Le gouvernement Marois refuse d'adhérer à la nouvelle stratégie d'éducation internationale du gouvernement Harper, estimant qu'il s'agit d'une autre tentative d'intrusion d'Ottawa dans une compétence exclusive du Québec.

La province a même l'intention de se retirer de cette initiative fédérale en plus de demander une compensation financière, ont annoncé mercredi, à Montréal, le ministre de l'Enseignement supérieur, Pierre Duchesne, ainsi que son collègue aux Affaires intergouvernementales, Alexandre Cloutier.

Ces derniers estiment que le Québec devrait recevoir au moins 3,2 millions $ de l'enveloppe totale de 23 millions $ de la Stratégie du Canada en matière d'éducation internationale, dévoilée la semaine dernière.

L'initiative fédérale, présentée par le ministre du Commerce international, Ed Fast, vise notamment à doubler, d'ici 2022, le nombre de chercheurs et étudiants étrangers au pays pour atteindre 450 000.

«C'est au Québec de déterminer ses besoins en matière de recrutement des étudiants étrangers», a martelé le ministre des Affaires intergouvernementales.

MM. Duchesne et Cloutier estiment que le Québec pourrait utiliser une compensation financière d'Ottawa pour bonifier diverses mesures déjà en place dans la province sur la mobilité étudiante.

Ils ont souligné que le gouvernement Marois pourrait notamment bonifier certains programmes de bourses ainsi que son soutien aux universités et collèges du Québec dans leur stratégie d'internationalisation en fonction de leurs besoins.

Pour l'année 2013-2014, Québec versera 17,5 millions $ en bourses et programmes de mobilité pour des étudiants qui souhaitent étudier à l'étranger. Les deux ministres estiment donc qu'une compensation financière d'Ottawa pourrait faire grimper cette somme.

Le ministre Duchesne a également critiqué la stratégie fédérale en affirmant qu'elle ne tenait pas compte de la réalité québécoise.

Pour atteindre son objectif, le gouvernement conservateur a l'intention de courtiser les marchés actuellement visés par le Plan d'action sur les marchés mondiaux, soit l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient, le Brésil, la Chine, l'Inde, le Mexique ainsi que le Vietnam.

«Le choix d'identifier des pays pour tenter d'attirer des étudiants étrangers, le gouvernement du Québec le fait avec les universités, a dit le ministre Duchesne­. Il y a une dimension au Québec où l'on va tenir compte de la francophonie.»

Selon lui, la stratégie que désire mettre de l'avant le gouvernement Harper ne fera qu'alourdir une structure administrative qui existe déjà.

«Là, on ajoute une deuxième structure, a déploré le ministre. Pourquoi dédoubler? Pourquoi compliquer? Le gouvernement Harper va rendre l'État inefficace en plus d'ajouter des structures insignifiantes.»

MM. Duchesne et Cloutier ont déjà effectué des représentations auprès de M. Fast. Le ministre de l'Enseignement supérieur lui a déjà fait parvenir une lettre, mercredi matin, afin de demander une rencontre.

Les deux ministres semblaient confiants d'avoir gain de cause.

«Comme ils (les conservateurs) agissent de façon illégale, ça sera à eux de justifier pourquoi cette initiative se rattache à leur champ de compétence, a souligné le ministre Cloutier. Ils doivent respecter le texte de la Constitution.»

Le ministre de l'Éducation supérieure a quant à lui rappelé que Québec et Ottawa avaient déjà réussi à trouver un terrain d'entente dans le passé en ce qui a trait à la compétence de l'éducation.

«Il y a déjà eu la tentative du fédéral d'instaurer les bourses du millénaire, a expliqué M. Duchesne. Il y avait eu des négociations (entre les deux parties) et la part du Québec avait été versée. Il y a des précédents.»

De son côté, le gouvernement Harper a balayé du revers de la main les revendications des ministres Duchesne et Cloutier.

«Les provinces et les territoires ont reconnu que la promotion du système d'éducation du Canada sur la scène internationale est une responsabilité partagée», a indiqué par courriel le ministre fédéral des Affaires intergouvernementales, Denis Lebel.

«Au lieu de chercher les chicanes, le gouvernement du Québec devrait travailler avec ses partenaires canadiens pour faire du Canada une destination phare de l'éducation internationale», a-t-il ajouté.