La liste des écoles aux prises avec des moisissures et des problèmes de qualité de l'air s'allonge constamment au Québec, particulièrement à la Commission scolaire de Montréal (CSDM). Pourtant, le gouvernement ignore l'étendue du problème.

Au ministère de l'Éducation, il n'existe aucune liste exhaustive des écoles touchées. Il n'y a pas de plan d'intervention non plus, a constaté La Presse à la suite d'une demande d'accès à l'information.

Au mieux, les commissions scolaires auront en main un guide de gestion des problèmes de qualité de l'air d'ici l'automne prochain. Un «comité technique» réunissant entre autres des intervenants du ministère de la Santé, du ministère de l'Éducation, de la santé publique et des commissions scolaires a en effet été mis sur pied à la fin de 2012 pour se pencher sur la problématique.

Pourtant, la qualité de l'air est «certainement la préoccupation de l'heure» dans les écoles, affirme le Dr Louis Jacques, médecin à la Direction de la santé publique de Montréal.

Le problème ne se limite pas au Québec. Que ce soit en Europe ou aux États-Unis, les mêmes problématiques éclatent au grand jour dans les écoles, avec les mêmes préoccupations.

Dans son cabinet, le Dr Jacques rencontre chaque jour des travailleurs dont la santé est affectée par les moisissures dans leur milieu de travail. Parmi eux, un grand nombre d'enseignants.

Le problème est sérieux, dit-il. «Plus on va repousser aux générations futures ce problème, plus il va devenir énorme et moins les politiciens vont vouloir s'y attarder. Mais on n'aura pas le choix. Il va falloir faire quelque chose, sinon c'est 100% du parc d'établissements qui va être touché.»

Au moins huit écoles sont actuellement fermées dans la province en raison de moisissures et de la mauvaise qualité de l'air, dont six à Montréal.

L'école Saint-Gérard, dans le quartier Villeray, et l'école Baril, dans Hochelaga-Maisonneuve, seront démolies et reconstruites. La CSDM rencontre d'ailleurs les parents des élèves de l'école Baril ce soir pour faire le point sur la situation.

Toujours dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve, le sort des écoles Hochelaga et Saint-Nom-de-Jésus est encore inconnu. Ces écoles sont également fermées en raison de moisissures, et des investigations plus poussées doivent permettre d'évaluer l'ampleur des dégâts.

La situation est incertaine dans plusieurs autres établissements, dont les écoles Louis-Riel, Des Nations et Sainte-Lucie, où des travaux majeurs seront réalisés en 2014.

Le gouvernement est plutôt silencieux sur la question des problèmes d'air dans les écoles. La ministre de l'Éducation, Marie Malavoy, s'est dite préoccupée par la situation. Pour Montréal, elle a dégagé 10 millions pour aider à la reconstruction de l'école Saint-Gérard, mais a indiqué que la CSDM doit puiser dans son budget pour les autres écoles.

Un déficit d'entretien de longue date

Il y a quelques années, le gouvernement a augmenté l'enveloppe budgétaire allouée à la réfection, l'entretien et le maintien des écoles dans toute la province afin de résorber le déficit d'entretien des bâtiments d'ici 2022. Les commissions scolaires se plaignaient d'un manque de ressources.

Cette enveloppe ne sera visiblement pas suffisante, du moins à Montréal. La CSDM compte le parc immobilier le plus vieux. Le laisser-aller pendant plusieurs années a causé un déficit difficile à rattraper.

Il manque encore des dizaines de millions de dollars pour venir à bout de toutes les toitures à réparer, des fenêtres à changer, des systèmes de chauffage désuets. Et cela ne tient pas compte des urgences à régler, lorsque des problèmes de qualité de l'air sont découverts dans des écoles.

Au total, la CSDM a à l'oeil une trentaine d'écoles jugées prioritaires dans le cadre de son Programme de qualité de l'air. Annoncé en mai 2012 au coût de 68 millions, le programme a permis d'inspecter à ce jour une centaine d'écoles.

Dès son annonce, il y a un an, la CSDM comptait sur une intervention financière de Québec pour l'aider. «Les discussions continuent», explique le président de la CSDM, Daniel Duranleau, en reconnaissant toutefois que la commission scolaire «ne pourra pas arriver à faire une bonne job si la question des ressources supplémentaires n'est pas au rendez-vous».

Bonne nouvelle, toutefois: la CSDM a appris au cours des derniers jours que le Ministère lui alloue encore cette année un budget pour le maintien des bâtiments. La somme serait d'au moins 50 millions.

Le dossier des moisissures est délicat. À quel moment faut-il fermer une école? Reloger les élèves? Dans certains cas, une meilleure ventilation des classes et un nettoyage plus assidu permettent de résorber les malaises qui semblent liés à la qualité de l'air.

C'était d'ailleurs l'une des recommandations du Vérificateur général du Québec, qui a publié un rapport à ce sujet l'automne dernier.

La décision de fermer une école et de déménager les élèves et le personnel doit être mûrement réfléchie, explique M. Duranleau. «Il s'agit quand même de grosses décisions. On ne veut pas que la moitié de Montréal soit démolie parce que c'est vieux.