Sans exception, les élèves qui travaillent avec un iPad en classe affirment qu'ils ne pourraient plus s'en passer. Mais aucun d'entre eux ne souligne que la tablette favorise l'apprentissage.

C'est ce qui ressort d'une vaste enquête - la première du genre - menée auprès de milliers d'élèves et d'enseignants du Québec, principalement dans des écoles secondaires.

L'étude sera dévoilée aujourd'hui, au cours du Sommet de l'iPad en éducation qui réunit quelque 500 personnes à Montréal. La Presse en a obtenu les principales conclusions.

Le constat est nuancé. Tout n'est ni noir ni rose, explique le principal auteur de l'étude, Thierry Karsenti, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les TIC en éducation.

«Les élèves sont heureux d'avoir un iPad à l'école. Par contre, il faut passer de cet état «heureux» à l'état heureux d'apprendre». Très peu le voient comme un outil d'apprentissage», résume M. Karsenti.

Un marché grandissant

En septembre dernier, quelque 5000 élèves disposaient d'une tablette en classe, principalement dans les collèges privés. À la prochaine rentrée scolaire, ils seront 15 000 élèves. L'iPad représente 75% du marché des tablettes dans les écoles.

Devant cet intérêt grandissant, il devenait primordial de réfléchir à l'usage qui est fait de la tablette, ses avantages et les défis qu'elle pose, explique M. Karsenti.

«Le premier désavantage qu'on a constaté est que l'iPad est une source de distraction majeure pour les élèves», note-t-il.

Tête baissée, les élèves ont les yeux rivés sur leur tablette. Pendant que l'enseignant parle à l'avant de la classe, ils sont sur Facebook ou s'envoient des messages.

Il n'est pas rare que tout le groupe éclate de rire devant l'enseignant déconcerté. Une blague qui mettait quelques minutes à circuler de pupitre en pupitre sur un bout de papier se répand maintenant à toute la classe en un seul clic.

L'enseignement 2.0

Des enseignants voient du positif dans ce défi, indique toutefois M. Karsenti. Ils sont obligés de se renouveler, d'être plus dynamiques, de se déplacer davantage entre les rangées d'élèves pour maintenir leur intérêt.

Dans la colonne des avantages, les possibilités offertes par l'iPad sont nombreuses. En science, les élèves dissèquent une grenouille comme si c'était une vraie. En français, l'enseignant peut ajouter ses commentaires dans un livre numérique. Les problèmes techniques qui survenaient souvent avec les ordinateurs sont maintenant presque inexistants.

L'utilisation de la tablette se heurte toutefois à beaucoup de méconnaissance, révèle l'étude.

Des enseignants de mathématiques exigent que leurs élèves achètent une calculatrice scientifique alors qu'on en trouve dans l'iPad. En français, des enseignants considèrent que la lecture doit se faire avec un livre «papier» et non pas numérique. D'autres demandent aux élèves de transporter leur dictionnaire alors qu'on en trouve de moins coûteux - et moins lourds - sur la tablette.

Des contrastes normaux qui incitent à une réflexion sur l'utilisation de la tablette à l'école, dit M. Karsenti. «L'innovation arrive et elle fait face à la résistance de la salle de classe.»

La «stratégie de déploiement» prend alors toute son importance. L'étude a ainsi révélé que les écoles où les enseignants ont été formés et ont reçu leur tablette plusieurs mois avant les élèves ont eu beaucoup de succès, explique M. Karsenti en citant la commission scolaire Sorel-Tracy.

L'enquête en chiffres

6057 élèves québécois ont répondu au questionnaire

350 élèves rencontrés en groupes de discussion

302 enseignants ont répondu au questionnaire

18 écoles participantes au Québec