Le salaire du nouveau recteur de l'Université Concordia, Alan Shepard, inquiète le gouvernement québécois, a indiqué le ministre de l'Enseignement supérieur, Pierre Duchesne.

«Les gens ont raison de se questionner, mais on ne peut pas juste dire qu'on se questionne. Il faut trouver des réponses et s'assurer que des gestes soient faits», a-t-il affirmé.

Le 9 mars dernier, Line Beauchamp avait imposé une pénalité de 2 millions de dollars à l'Université Concordia pour sa mauvaise gestion de fonds. Lors d'une entrevue accordée à La Presse, Pierre Duchesne a dit qu'il compte vérifier si cette punition a été appliquée.

«J'ai demandé à mon équipe de vérifier si ç'a bien été fait et par quels mécanismes ils [les libéraux] ont procédé.» Le ministre ajoute qu'en tant qu'élu, il a le «devoir de veiller» sur l'argent des contribuables.

Plusieurs bonus

Un salaire de base de 357 000$ et la possibilité d'obtenir un boni de 74 400$ par année: voilà les grandes lignes du contrat du nouveau recteur de l'Université Concordia.

M. Shepard a accepté l'offre de l'Université le 19 mai dernier et est entré en poste il y a à peine deux mois. Il bénéficiera de plusieurs primes.

Ainsi, l'Université Concordia lui versera 50 400$ par année pour sa résidence. Il s'agit d'ailleurs de 14 400$ de plus que son prédécesseur, Frederick Lowy. «Il accueillera de grands groupes dans sa maison [...] et il lui faudra une résidence significativement plus grande», peut-on lire sur le contrat, que La Presse a obtenu.

Alan Shepard pourra aussi compter sur une somme mensuelle de 1200$ pour l'achat d'une automobile. S'il fournit à l'Université les factures de ses dépenses, telles que les «frais d'immatriculation, d'assurance, de réparation et d'entretien», elles lui seront toutes remboursées.

À chaque fin d'année, l'homme sera admissible à un «bonus de performance» pouvant atteindre 20% de son revenu annuel.

«C'est une honte»

Dans les couloirs du campus, plusieurs membres du corps professoral ont longuement hésité avant de commenter ces informations. Tous ont demandé de conserver l'anonymat, pour ne pas s'attirer les foudres de la direction.

«C'est une honte pour Concordia, mais une honte pour le Québec. Comment peut-on proposer ça à un seul homme? C'est se foutre de notre gueule!», s'est exclamé un professeur du département de science politique.

D'autres ne sont pas surpris de l'argent offert au recteur. «Il a des dossiers importants à régler, c'est certain, mais à quel prix doit-il le faire? C'est ça, la question», a dit une chargée de cours.

«Le marché pour des dirigeants aux postes de l'administration supérieure à Concordia ne se limite pas uniquement au Québec, mais s'élargit à l'ensemble du Canada, s'est défendu le président du conseil d'administration de l'Université, Norman Hébert. On reconnaît que la compétition pour attirer le candidat le plus compétent est très féroce. Nous étions dans l'obligation de nous adapter aux exigences du marché pour attirer une personne du calibre de M. Shepard.»