Une cinquantaine d'enfants risquent de perdre leur place dans une garderie à 7$ dans un secteur défavorisé et multiethnique de l'arrondissement d'Anjou. Un avis d'éviction pèse sur le CPE Bille de verre, son personnel et, surtout, sur les familles qui attendent de connaître le sort de leur garderie.

Les locaux du CPE, situés dans un petit centre commercial de la rue Jarry, sont mal adaptés pour accueillir des poupons et des enfants d'âge préscolaire: problèmes de chauffage, moisissures, pièces trop petites, vermine. Il y a trois ans, le ministère de la Famille aurait recommandé à la direction de ne pas renouveler son bail, sans toutefois proposer de solution, soutient Gilles Duval, directeur général par intérim du CPE Bille de verre. Or, le propriétaire du bâtiment vient de mettre en demeure le CPE de signer un bail ou de quitter les lieux.

M. Duval est arrivé au CPE Bille de verre en novembre dernier pour tenter de redresser la situation. Il ne comprend ni pourquoi le Ministère a recommandé de ne pas signer de bail, ni comment la garderie privée a pu être convertie en CPE en 2001.

Aujourd'hui, devant cette menace d'expulsion, il demande l'aide du Ministère. «Le Ministère fait partie de la base du problème, donc il doit nous aider à trouver une solution. Notre CPE est un cas exceptionnel, et ça va prendre une solution exceptionnelle», dit-il.

Dernier recours

Même si les locaux sont désuets, Valer Berlinski se trouve choyé d'avoir trouvé une place dans une garderie à 7$ par jour. De plus, Clara, 4 ans, et Alex, 2 ans, adorent les éducatrices, qui gardent le sourire même si elles travaillent dans des conditions difficiles. «C'est sûr qu'on est inquiets. On habite près d'ici, alors s'il fallait que le CPE déménage, on devrait s'acheter une voiture», dit-il. Le CPE accueille une dizaine de poupons, deux enfants handicapés et plusieurs enfants de familles au revenu modeste. Des 50 enfants qui le fréquentent, 48 viennent de familles immigrées. «Étant donné le manque criant de places [dans les garderies à 7$], ceux qui en ont une endurent des choses qu'ils ne devraient pas, même dans la pire des situations», dit Marie Bouillé, porte-parole de l'opposition officielle en matière de famille.

Situation «inacceptable»

La députée d'Iberville croit que le Ministère doit aider l'administration du CPE à trouver de nouveaux locaux. «C'est inacceptable qu'on laisse des enfants dans une situation comme celle du CPE Bille de verre. Il y a 50 enfants, dont 10 poupons, qui sont menacés et aussi dans une situation délicate. C'est troublant, choquant, hallucinant. C'est comme si le ministère de la Famille avait laissé tombé ce CPE.»

De son côté, le Ministère nie avoir abandonné la garderie d'Anjou et rappelle qu'il ne peut pas facilement s'immiscer dans la gestion des CPE. «Les garderies ont une autonomie. Elles gèrent leurs affaires. On ne peut pas intervenir dans leur gestion», rappelle Étienne Gauthier, porte-parole du Ministère.

Selon lui, le Ministère attendrait quelques documents pour pouvoir faciliter le déménagement. Mais en attendant que la paperasse se règle, les 50 enfants et leur famille demeurent toujours incertains quant à leur avenir.