Un étudiant a pu assister à son cours d'anthropologie pour la première fois depuis près de deux mois, mardi à l'Université Laval, après avoir obtenu une demi-victoire en Cour supérieure, pour mettre fin aux piquets de grève qui lui bloquaient l'accès.

Quelques heures à peine après la décision du tribunal, Laurent Proulx s'est rendu à son cours, sous le regard des médias qui s'étaient déplacés pour l'événement.

Lors d'un point de presse suivant le jugement, au palais de justice de Québec, M. Proulx s'était réjoui même s'il réclamait une ordonnance du tribunal s'appliquant à l'ensemble de l'établissement.

L'ex-militaire de 24 ans a estimé que l'injonction obtenue ouvre la porte à d'autres recours d'étudiants qui se disent lésés par les moyens de pression déployés en opposition à la hausse des droits de scolarité.

«Le jugement est formel, on rétablit mon accès au cours, pour moi c'est une victoire, a-t-il dit. Je ne trouve pas que c'est une demi-victoire parce que ça ouvre la porte à beaucoup d'étudiants à m'imiter. D'ailleurs je les invite, ceux qui sont brimés dans leurs droits, à faire de même.»

Dans sa décision, le juge Bernard Godbout a circonscrit l'application d'une injonction interlocutoire provisoire d'une durée de 10 jours au cours intitulé «Anthropologie des conflits et de la violence», interrompu depuis le 14 février en raison d'un débrayage des étudiants.

Le magistrat a confié à l'Université Laval la responsabilité d'assurer que le piquetage des étudiants, qui ont voté pour la grève, n'empêche pas l'accès à la salle de classe, où le cours est à l'horaire le mardi après-midi.

Lundi, M. Proulx avait fait valoir au tribunal qu'en le privant de l'accès à ses cours, le mouvement de grève étudiant brimait ses droits et lui causait un préjudice.

L'étudiant avait affirmé qu'il ne pourrait assister à la reprise des cours envisagée actuellement par l'université en raison d'un engagement envers un employeur de sa région, à la date prévue pour la fin de session avant le débrayage.

M. Proulx avait aussi souligné que les perturbations pourraient compromettre sa demande d'admission en droit.

Mardi, le juge Godbout a conclu qu'il y avait urgence d'émettre une injonction. Le magistrat a souligné que l'étudiant pourrait subir un préjudice irréparable en raison de la difficulté d'obtenir une compensation pour tout retard.

Le juge Godbout a observé que son ordonnance, qui devra faire l'objet d'un débat plus approfondi le 12 avril, n'empêcherait pas les étudiants de manifester mais exigerait plutôt qu'ils ne bloquent pas les accès au cours.

Malgré la porte ouverte à d'autres recours semblables, les représentants d'associations étudiantes ont minimisé l'impact de la décision de la Cour supérieure, en soulignant notamment son caractère temporaire.

Le président de la Coalition des associations d'étudiants de l'Université Laval (CADEUL), Martin Bonneau, a déclaré que les étudiants pourront continuer leurs actions.

«Ce qu'on trouve un peu dommage de ce qu'on a vu aujourd'hui, c'est que le droit d'un individu l'a emporté sur le droit collectif de protester. C'est assez inquiétant pour moi, en tant que société, ce que ça pourrait avoir comme conséquences», a-t-il dit.

La semaine dernière, dans une autre cause présentée par une étudiante du Collège d'Alma qui avançait que les règlements de l'assemblée générale menant à la grève n'avaient pas été respectés, un juge de la Cour supérieure avait ordonné la reprise des cours dans l'institution.

Le Collège d'Alma a par ailleurs été brièvement évacué, mardi, à la suite d'une alerte à la bombe. La situation était de retour à la normale en début d'après-midi. Les policiers de la Sûreté du Québec n'avaient rien trouvé. L'enquête se poursuit afin de mettre la main au collet du plaisantin qui a alerté les autorités.

Dans une troisième cause, à Montréal la semaine dernière, Guillaume Charette, inscrit en droit à l'Université de Montréal, avait vu sa requête déboutée en Cour supérieure par le juge Luc Lefebvre.

Il soutenait que les étudiants qui ont payé pour des cours devraient avoir le droit de les suivre sans obstruction ou harcèlement.