La directrice générale de la Société de soutien à l'enfance et à la famille des Premières nations, Cindy Blackstock, a accusé mercredi le gouvernement fédéral de négliger l'éducation des jeunes autochtones, en indiquant que le financement de projets militaires et de diverses autres initiatives ne devrait jamais mettre le futur des jeunes en péril.

Mme Blackstock a fait cette déclaration dans le cadre de la rencontre annuelle de l'Assemblée des Premières Nations, lors d'une session spéciale consacrée à l'éducation.

«La discrimination raciale contre les enfants ne devrait pas être une mesure de restriction budgétaire légitime», a-t-elle déclaré devant les délégués réunis dans un hôtel du centre-ville de Moncton.

«Il est de notre devoir de nous assurer qu'il (le gouvernement) ne finance pas des avions de combat et d'autres types de projets aux dépens des enfants qui ne demandent qu'à fréquenter l'école.»

Applaudie à tout rompre à plusieurs reprises, Mme Blackstock a expliqué que tous les enfants - quelle que soit leur ethnie - méritaient d'être éduqués dans des écoles propres et sécuritaires. Mais, selon elle, ce n'est pas le cas pour les enfants autochtones.

Le ministre fédéral des Affaires intergouvernementales, l'Innu Peter Panashue, a pour sa part assuré qu'Ottawa avait fait de ce dossier une priorité.

«Je crois que le gouvernement du Canada reconnaît qu'il y a un problème en matière d'éducation, que l'Assemblée des Premières nations reconnaît qu'il y a un problème, et que les chefs des nations autochtones de l'ensemble du pays reconnaissent qu'il y a un problème», a déclaré le ministre après avoir assisté à une partie de la réunion.

M. Panashue, qui est le premier député innu, a vanté le travail d'un comité mixte, qui cherche à trouver des moyens d'améliorer l'éducation des enfants autochtones, de la maternelle à la douzième année. Le comité a été mis sur pied le mois dernier par l'Assemblée et le gouvernement fédéral. Il cherche à améliorer l'impact de l'éducation sur les enfants autochtones, dont près de la moitié ne terminent pas le secondaire.

Le comité sollicitera la participation du public à propos de la manière d'élaborer la législation qui permettrait aux membres des Premières nations de voter leurs propres lois sur l'éducation, de gérer et d'améliorer la qualité de la formation scolaire et, enfin, de mettre sur pied des tables de concertation régionales en milieu scolaire.

M. Penashue n'a pas voulu annoncer de financement additionnel en éducation, disant préférer attendre que le comité complète son travail.

«Je crois que l'examen qui est en cours est très important. Il sera bénéfique pour l'Assemblée des Premières nations dans l'ensemble du pays, et pour le gouvernement du Canada», s'est-il contenté d'affirmer.

«Je crois que nous reconnaissons tous que le montant d'argent destiné à l'éducation est substantiel. Le problème, c'est que nous ne comprenons pas très bien pourquoi l'éducation n'obtient pas les résultats escomptés.»

De son côté, Cindy Blackstock estime plutôt qu'il n'y a pas assez d'argent dans l'enveloppe de l'éducation.

Elle a affirmé qu'au pays, on estime que les enfants autochtones reçoivent de 2000 à 3000 $ de moins que les enfants qui vivent hors-réserve pour leur éducation.

Mme Blackstock a ajouté que sur certaines réserves, les écoles devaient se battre contre la moisissure qui envahit leurs murs, en ajoutant qu'elle avait entendu parler d'une école infestée par les serpents.

Mme Blackstock a ensuite précisé qu'il n'était pas question d'opposer autochtones et autres Canadiens, mais plutôt de rassembler les Canadiens qui «croient en l'égalité, l'équité et la justice».

Selon elle, «la discrimination que subissent les enfants autochtones» n'a pas sa raison d'être.

Le chef de la réserve algonquine de Kitigan Zibi, Gilbert Whiteduck, croit quant à lui que le comité mis sur pied par le gouvernement fédéral ne fait qu'augmenter les délais dans le dossier. Il a affirmé que les autochtones observaient leurs langues disparaître et leurs jeunes décrocher de l'école, pendant que les dollars du gouvernement fédéral continuent d'être distribués pour d'autres projets à travers le pays.

«Le ministre nous dit qu'il n'est pas prêt à signer un chèque en blanc», a affirmé M. Whiteduck.

«Mais, quelle sorte de chèque est donné aux Forces armées? Quel genre de chèque est signé à certaines régions du Canada?», a-t-il demandé.