Dennis Kinko, qui enseigne depuis 25 ans l'éducation physique à l'école FACE, à Montréal, est inquiet. Pour des raisons administratives, il dispose aujourd'hui de ses deux mois de congé d'été pour se familiariser avec les programmes d'éthique et de culture religieuse, d'histoire et de géographie, qu'il devra enseigner dès l'an prochain.

«Je n'ai pas la formation, je n'ai pas les connaissances pour faire ça. J'ai seulement quelques semaines pour apprendre!» dit M. Kinko.

 

L'école FACE, qui se spécialise dans l'enseignement des arts, possède un statut particulier au ministère de l'Éducation. En fait, deux écoles, l'une anglophone et l'autre francophone, cohabitent dans le même immeuble et possèdent le même conseil d'établissement.

Mais même si elles cohabitent, les deux écoles, qui reçoivent des élèves du primaire et du secondaire, sont bien distinctes. Le côté francophone relève de la Commission scolaire de Montréal (CSDM), alors que l'anglophone fait partie de la commission scolaire English Montreal.

Depuis quelques années, le statut particulier de l'école FACE a entraîné plusieurs situations hors normes. Par exemple, des enseignants, dont M. Kinko, pouvaient enseigner aussi bien au primaire qu'au secondaire, une pratique inusitée.

«Certains enseignants avaient même des tâches à la fois du côté anglophone et du côté francophone, alors que les deux possèdent des syndicats distincts», explique le porte-parole du syndicat de l'Alliance des professeurs de Montréal, Daniel Choquette.

Des changements l'an prochain

Selon M. Choquette, ce manque d'encadrement entraînait certains problèmes de gestion et d'équité au syndicat. «À l'Alliance et à la CSDM, on a donc décidé de régulariser certaines situations tout en respectant le fait que l'école FACE est unique et se spécialise en arts», affirme M. Choquette.

Dès l'an prochain, seuls les professeurs de disciplines artistiques pourront continuer d'enseigner à la fois au primaire et au secondaire. M. Kinko et les autres enseignants d'éducation physique devront se consacrer soit au primaire, soit au secondaire. Selon M. Choquette, 38 des 55 enseignants de l'école FACE ont été sondés, et la majorité se sont dits en accord avec cette nouvelle mesure.

Mais pas M. Kinko. Dorénavant, puisqu'il ne pourra plus enseigner au secondaire, seulement 80% de sa tâche sera comblée par les cours d'éducation physique. «Pour les 20% restants, je devrai enseigner d'autres matières», dit-il.

M. Kinko ne comprend pas que, alors qu'il a pu enseigner au primaire et au secondaire pendant 25 ans, on lui interdise aujourd'hui de le faire. «J'ai un brevet pour enseigner au secondaire. Mais je ne pourrai plus le faire, juste parce que je ne suis pas spécialiste en arts! Je vais devoir donner des cours dans une classe, ce que je n'ai jamais fait! Ce sont les enfants qui vont payer pour ça», déplore-t-il.

M. Choquette dit comprendre la déception de M. Kinko. Mais il assure que d'autres enseignants donnent des matières autres que leur spécialité dans les écoles de la CSDM et que M. Kinko a les compétences nécessaires pour faire de même.