Les parents les plus fortunés pourront continuer d'acheter pour leur progéniture l'accès à l'école anglaise, redoute le Parti québécois.

Le gouvernement Charest fera savoir mercredi ce qu'il entend faire des «écoles passerelles», mais les informations qui ont filtré jusqu'à maintenant n'inspirent rien de bon à l'opposition officielle.

«Si ces informations sont exactes, les élèves inscrits au secteur anglophone non subventionné pourraient y séjourner trois ans et ensuite avoir accès à l'école anglaise pour leurs frères, soeurs et descendants. Cette solution nous semble inacceptable», a lancé mardi la chef péquiste Pauline Marois lors d'un débat à l'Assemblée nationale.

Attendue depuis des semaines, la réponse du gouvernement au jugement de la Cour suprême du Canada risque de braquer à nouveau les projecteurs sur l'épineux débat sur la langue d'enseignement au Québec.

L'an dernier, le plus haut tribunal du pays a invalidé la loi 104, adoptée en 2002 par le gouvernement du Parti québécois, pour mettre un terme aux pratiques litigieuses des écoles dites passerelles.

Des élèves fréquentaient ces établissements privés non subventionnés pendant un an, le temps nécessaire pour intégrer en toute légalité le réseau scolaire anglophone.

Ainsi, des parents disposant de moyens financiers élevés pouvaient «acheter» pour leur descendance l'accès à l'école anglaise subventionnée.

D'après les renseignements qui circulent au sujet du projet de loi, les élèves devront dorénavant passer au moins trois ans dans le secteur anglophone non subventionné, soit la moitié du primaire, avant d'espérer pouvoir accéder au réseau anglophone régulier.

De son côté, le ministère de l'Éducation examinera le dossier de chaque écolier avant de lui accorder ou non le droit de fréquenter les institutions régulières anglophones.

Pour les parents qui tiennent à obtenir «un droit de passage» pour leurs enfants dans le réseau anglophone, la facture sera salée.

Selon la chef du PQ, le gouvernement fait fausse route dans ce dossier et devrait plutôt se ranger derrière l'avis du Conseil supérieur de la langue française selon lequel «il ne devrait pas être possible de s'acheter un droit constitutionnel en payant pour les études de son enfant au secteur non subventionné».

Pour y parvenir, le gouvernement doit respecter la motion unanime de l'Assemblée nationale «qui veut que nous appliquions la loi numéro 101 aux écoles privées non subventionnées même en utilisant la clause «nonobstant», a soutenu Mme Marois.

Mais le recours à la clause dérogatoire n'est pas dans les cartons du gouvernement Charest. Québec veut se limiter à définir, comme le lui suggère la Cour suprême du Canada, la notion de «parcours authentique» de l'élève dans le réseau anglophone.

«La Cour suprême du Canada (...) demande, suite au jugement de la Cour d'appel du Québec, de définir de manière plus élaborée ce que c'est le parcours authentique. Et c'est en ce sens-là que le gouvernement du Québec va proposer des solutions», a dit le premier ministre Jean Charest en Chambre.

Sans donner plus de détails, M. Charest a ajouté que la solution préconisée par le gouvernement visera non seulement à protéger la langue française, mais aussi à faire la promotion de son rayonnement.

«C'est dans cet esprit-là, puis avec ce sens des responsabilités, que nous allons réagir au jugement», a-t-il dit.

À chaque année, avant l'adoption de la loi 104, quelque 1000 élèves qui auraient dû fréquenter des établissements francophones passaient au réseau anglophone grâce aux écoles passerelles.