La construction de nouvelles places en garderie accuse un retard important, selon ce qu'a appris La Presse Canadienne, mardi.

Au moins 40 pour cent des projets de construction de Centres de la petite enfance (CPE) présentement en cours ne pourront pas être livrés à temps, soit d'ici mars 2010, a confirmé le ministère de la Famille.

Québec finance cette année 52 projets à travers le Québec et 21 de ceux-ci ne respecteront pas l'échéancier prévu, dont bon nombre à Montréal, indiquent les plus récentes données gouvernementales.

Ce sont les conseils d'administration des CPE qui gèrent les appels d'offres pour la construction des nouvelles installations, mais l'Association québécoise des CPE (AQCPE) jette le blâme sur Québec.

Au premier chef, on reproche à l'ex-ministre de la Famille, Michelle Courchesne, d'avoir annoncé en grandes pompes, en juillet 2008, quelques mois avant le déclenchement des élections, le développement accéléré des places en garderie, sans s'être assurée que «la machine» pouvait répondre à la demande.

On pointe du doigt les échéances irréalistes de Québec et les règles trop strictes.

Chose certaine, le «fast-track» dans les services de garde annoncé alors par Mme Courchesne n'aura pas lieu, a indiqué le directeur général de l'AQCPE, Jean Robitaille, lors d'une entrevue récente à La Presse Canadienne.

L'association avait sonné l'alarme, en septembre, à partir d'un sondage mené auprès de son millier de membres.

Le sondage indiquait que pas moins de 75 pour cent de la centaine de projets de construction ou d'agrandissement de CPE, pour l'année en cours, affichaient un retard sur l'échéancier prévu, et souvent de plusieurs mois.

Depuis, on a tenté de corriger le tir, mais il ne fait pas de doute, dans le milieu des CPE, que des centaines de places manqueront à l'appel.

Le ministre de la Famille, Tony Tomassi, s'était engagé à offrir aux parents 6300 places supplémentaires à 7 $ cette année. Malgré le retard enregistré, on maintient le cap sur l'objectif, en faisant valoir que d'autres projets, prévus pour 2011, seront devancés.

Depuis l'été 2008, les conseils d'administration des CPE, qui agissent comme «promoteurs» des projets, estiment avoir dû procéder à toute vapeur, avec des résultats souvent discutables, voire loufoques.

«Les promoteurs ont eu 45 jours pour monter, préparer leur dossier, alors c'est sûr que dans ces cas-là les projets n'étaient pas tous complètement ficelés», admet M. Robitaille, en notant qu'il faut compter environ un an et demi pour construire un nouveau CPE.

Le problème devient criant à Montréal, où, en plus de délais jugés trop serrés, on doit composer avec la rareté des terrains, au surplus non contaminés.

Dans ce climat d'urgence, on a vu des conseils d'administration octroyer un contrat à un entrepreneur pour bâtir un CPE, sans même avoir de terrain où l'installer.

«On s'est retrouvés avec trois ou quatre CPE et garderies privées qui avaient l'oeil sur le même terrain», relate M. Robitaille, en ajoutant que cette situation avait fait grimper le prix des terrains et retardé l'ouverture de places.

En somme, selon lui, le cadre de fonctionnement imposé par Québec «a occasionné des problématiques sérieuses dans le rythme de développement» du réseau.

Autrement dit, en voulant aller trop vite, sans se donner la peine de bien planifier la procédure, le gouvernement a en fait retardé la création de places, selon l'association.

«On questionne sérieusement la façon de faire», dit M. Robitaille, qui juge que certaines règles, comme l'obligation de trouver trois soumissionnaires pour chaque projet, retardent les choses, dans certaines régions où c'est pratiquement impossible à réaliser.

Au bout du compte, le tourbillon d'expansion qui frappe le réseau depuis un an a créé, selon lui, un climat de tensions entre Québec et le milieu, qui se sent plus que jamais bousculé, déplore-t-il.

Informé au début de l'automne des retards dans la construction des CPE, le ministre Tomassi a fait expédier une lettre aux conseils d'administration pour leur dire d'accélérer les choses, en les menaçant même de leur retirer leurs places si les délais n'étaient pas respectés.

Mais loin de régler le problème, son intervention a plutôt mis le feu aux poudres, son geste étant jugé «cavalier».

Chaque nouvelle installation coûte en moyenne 800 000 $ et offre 80 places.

La facture est totalement assumée par les contribuables, qui versent au total au réseau des services de garde quelque 1,6 milliard $ par année.