C'est une école où la cloche ne sonne jamais. Il y a des tables de billard, des jeux de baby-foot et des télés câblées dans la salle de classe. Deux professeures y enseignent toutes les matières et font un suivi serré de leurs 17 élèves, à haut risque de décrocher. Cette école - qui n'en est pas vraiment une - c'est le projet Déclic, installé depuis l'automne dans une maison de jeunes d'Hochelaga-Maisonneuve.

Déclic est une réussite: un seul élève a abandonné en cours d'année. «Pourtant, tous manquaient fortement de motivation et avaient des difficultés à l'école, dans leurs notes ou leur comportement, dit Patricia Bouchard, l'enseignante instigatrice du projet. On a vraiment essayé de faire l'école autrement, pour qu'ils se trouvent un but.»

Chomedey-De Maisonneuve, leur école d'origine, a un maigre taux de promotion de 50,3%, selon le dernier palmarès. Bien qu'ils soient âgés de 15 à 17 ans, les élèves de Déclic y étaient inscrits en troisième secondaire. Ils ont suivi le programme normal à Déclic, à deux différences près. Les arts ont cédé leur place à un cours sur les problèmes du quartier, dans le cadre duquel les jeunes ont fait du bénévolat.

Quant aux sciences, elles ont été remplacées par un cours d'exploration professionnelle, qui a mené à un stage de quatre jours dans une école de métier. Alaric Pelletier, 16 ans, y a trouvé sa voie: dès le mois de septembre, il suivra un programme professionnel en «pose de systèmes intérieurs».

«Je vais poser des murs, des plafonds, des planchers, des escaliers, énumère-t-il. Avant, je ne savais pas que ça prenait juste un secondaire 3 pour y aller. Tu trouves le temps moins long après ça, quand tu sais que tu vas pouvoir être sur le marché du travail bientôt. Je vais construire ma maison, ça va rocker!»

Encadrement constant

À Déclic, les élèves travaillent «deux, trois fois plus fort qu'à l'école», indique Alaric. «Le vendredi après-midi, on n'a pas de cours si on a fini ce qu'on a à faire, précise Alexandre Cadieux-Bouchard, 15 ans. Ça nous motive.»

«L'avantage, ici, c'est qu'on connaît bien les élèves, souligne Mme Bouchard. Quand ils ne sont pas là deux jours, c'est sûr qu'on appelle à la maison. C'est difficile pour eux de se pousser!» Chaque semaine, on rencontre les jeunes en privé pour faire le point sur leur évolution. Et une éducatrice spécialisée vient à la rescousse trois après-midi par semaine pour les problèmes plus lourds. «On a réglé des situations qui, à l'école, auraient explosé», estime Mme Bouchard.

«Je ne connais plus personne qui va à l'école»

Les jeunes mesurent leur chance. «Je ne connais plus personne qui va à l'école, souligne Mathieu Patterson, 16 ans. Être ici, ça m'a permis d'être moins dans la merde puisque j'étais surveillé.» Après avoir raté sa troisième secondaire l'an dernier, Mathieu a eu des notes de 75% et 80% à Déclic. «Ça a passé vite», constate-t-il avec étonnement. L'adolescent compte obtenir un DEP de machiniste l'an prochain, tout en finissant quelques cours de quatrième secondaire.

«Ils sont tristes de partir, confie Katia Valcourt, l'autre enseignante. Le lien qu'ils ont avec nous est fort. C'est impossible de reproduire ça en classe.» Un prof du secondaire a, normalement, six groupes de 32 adolescents à voir dans la même semaine.

Les trucs de Déclic

> Des cours d'une heure au lieu de 75 minutes

> Un ratio maître/élève de deux enseignantes pour 17 jeunes

> Des rencontres individuelles chaque semaine

> Un cours d'exploration professionnelle

> Récompense: congé le vendredi après-midi quand tout va bien

> Situé dans une maison de jeunes, hors de l'école