«À Napierville? Je suis très étonné», a dit Pierre Anctil, spécialiste des hassidim et professeur à l'Université d'Ottawa, en apprenant qu'une école juive clandestine est installée à 45 minutes au sud de Montréal.

«Le fait que ce soit si isolé, c'est parce qu'ils veulent sortir les jeunes de la ville et des milieux où ils rencontrent des influences néfastes, a-t-il analysé. Ça peut être dans le milieu juif lui-même, des gens qui ne pratiquent pas, qui se moquent de la religion, de leurs parents, des choses comme ça.»

 

Selon lui, la clientèle de la yeshiva Or Menachem est probablement composée de jeunes hassidim et de jeunes juifs orthodoxes, non hassidim. «C'est possible que les parents confient aux juifs hassidiques certains jeunes qui ont des problèmes de tout ordre: drogue, fugue, refus de pratiquer la religion, refus de l'autorité parentale», a-t-il dit.

Obtenir un permis du ministère de l'Éducation sera difficile pour la yeshiva. «En général, ils n'enseignent pas le français, a indiqué le spécialiste. Je serais très surpris qu'ils enseignent l'histoire ou la biologie, qui contredisent le récit biblique.»

Même les manuels approuvés par le Ministère posent un problème aux hassidim. «Ils utilisent du matériel où on ne voit pas de jeunes femmes et de jeunes hommes dans les mêmes images, où il n'y a pas de gens en t-shirt, etc.»

Envoyer les jeunes à l'école publique est aussi impensable pour eux. «C'est impossible, strictement impossible, a indiqué M. Anctil. Parce que le but de l'exercice, c'est de les isoler du monde et de leur donner une formation religieuse. S'ils les envoient dans des écoles publiques, ce serait tout défaire. Ils ne pourraient pas manger le midi parce que ce ne serait pas casher, ils ne pourraient avoir aucune interaction suivie avec le milieu. Ils verraient des jeunes femmes habillées d'une manière que nous jugeons normale, mais qu'eux jugeraient indécente. Ce n'est pas faisable.»

«Mais il faut éviter de les présenter comme un groupe pathologique ou marginal, a-t-il ajouté. C'est plus complexe que ça. Il faut partir de leur point de vue à eux, qui est que fondamentalement, ils répondent à un impératif de pratique religieuse intense.»

 

La communauté Loubavitch

La yeshiva Or Menachem est tenue par des Loubavitchs. «C'est la communauté hassidim généralement la plus ouverte sur l'extérieur, dit Pierre Anctil, spécialiste des hassidiques et professeur à l'Université d'Ottawa. C'est-à-dire ouverte sur la communauté juive en général et non pas sur le monde plus vaste.» À Montréal, les Loubavitchs sont moins de 2000, selon lui. Dans le monde, ils sont «quelques dizaines de milliers, mais certainement moins de 100 000», a-t-il précisé.