Le ministère de l'Éducation tarde à serrer la vis à l'académie juive orthodoxe Yeshiva Toras Moshe, de Montréal, qui refuse de se conformer à la loi. Sans permis, cette école donne un enseignement presque uniquement religieux aux 140 garçons du primaire qu'elle reçoit.

Dans un État de la situation daté du 23 décembre 2008, obtenu par La Presse en vertu de la Loi d'accès à l'information, le Ministère rappelle que la Yeshiva refuse de faire les ajustements demandés «sous prétexte de contraintes religieuses». La ministre Michelle Courchesne a donc refusé de lui délivrer un permis. «L'établissement ayant malgré tout continué à offrir des services éducatifs, le dossier devrait être transmis au Procureur du Québec sous peu», précise le document.

 

Cela a-t-il été fait? «Non, parce qu'il y a toujours des discussions avec la Yeshiva Toras Mosche, a dit hier Jean-Pascal Bernier, attaché de presse de Mme Courchesne. Mais c'est certain que pour la ministre, il va falloir que cette école ait un permis. Ce n'est pas le statu quo.»

Radio-Canada a révélé, dimanche, l'existence de cette Yeshiva qui scolarise illégalement les garçons de la communauté Satmar depuis 1952. Des manquements graves y ont été observés dans ses deux campus (situés rue Saint-Urbain et Bates), selon le dernier rapport annuel de la Commission consultative de l'enseignement privé.

En première année du primaire, la Yeshiva n'offre «que de l'enseignement religieux». Dans les autres années, seules 5 heures par semaine (au lieu de 25) sont consacrées aux disciplines autres que religieuses. Aucun des cinq professeurs donnant l'enseignement séculier ne détient d'autorisation d'enseigner. Seules les ressources financières, provenant à 85% de dons, sont satisfaisantes.

Le programme québécois «heurte» leurs croyances

Dans une lettre envoyée au Ministère le 25 juillet dernier, l'ex-avocat de la Yeshiva, Me François Houde, fait valoir que «plusieurs éléments du programme (québécois) heurtent les croyances et préceptes religieux» de la communauté. Il précise que les élèves doivent «se développer dans le respect des lois religieuses qui gouvernent la communauté», afin de «devenir des personnes complètes et actives pour la société dans laquelle ils évolueront à l'âge adulte». Il ne semble pas être question ici de la société québécoise.

Une seconde lettre de l'avocat, datée du 8 octobre, propose une «ouverture de notre cliente» à reconsidérer sa position si une étude comparative de son programme et de celui du Québec est faite. Cette condition a été refusée par le Ministère, qui a souligné dans une lettre datée du 29 octobre que seules la langue et les maths étaient enseignées à la Yeshiva (outre la religion juive), ce qui est insuffisant.

Il semble que la Yeshiva attende le résultat de la demande de permis des écoles Belz et Skver «avant de présenter une demande» une seconde fois, selon Ahissia Ahua, porte-parole du MELS.

«Je ne suis pas en mesure de vous faire part de quelque commentaire que ce soit», a dit Yann Bernard, le nouvel avocat de la Yeshiva, qui n'avait pas parlé à ses représentants. La Yeshiva Toras Mosche n'a pas rappelé La Presse.