L'un des avocats qui cherchent à représenter toutes les victimes de la tragédie de Lac-Mégantic a lourdement accablé les sociétés pétrolières et les entreprises ferroviaires impliquées dans l'accident, hier matin, aux premières heures d'une demande d'autorisation de recours collectif.

Devant une salle du palais de justice de Sherbrooke accueillant plusieurs dizaines d'avocats, Joël Rochon a fait valoir que l'accident était «complètement évitable».

Le juge Martin Bureau devra décider s'il autorise le recours collectif, sans toutefois se prononcer sur le fond de l'affaire. En bref, le magistrat devra décider s'il autorise - ou pas - un groupe de quatre citoyens et leurs avocats à représenter toutes les personnes affectées par l'accident.

Ce processus pourrait prendre deux semaines.

Me Rochon a annoncé que si le recours collectif était autorisé, il ferait la preuve que les 53 entités mises en cause ont manqué à leurs responsabilités quant à la substance dangereuse transportée, à son identification et à son mode de transport.

«Toute l'industrie savait que le pétrole de schiste [...] est très volatil et très porté à exploser en cas d'accident», a plaidé Me Rochon. Toute l'industrie «savait que le wagon DOT-111 [le modèle impliqué dans la tragédie] n'était pas la bonne pièce d'équipement pour transporter cette substance», a-t-il ajouté.

Pour sa part, «Transports Canada a complètement échoué dans sa tâche de faire appliquer sa réglementation», a aussi dit Me Rochon.

Dans la salle d'audience, les bancs normalement réservés au public étaient occupés par de nombreux avocats représentant les 52 entreprises et individus visés par la procédure ainsi que le gouvernement. Les entreprises responsables de la chaîne de production, du transport et de la transformation du pétrole sont notamment citées.

Me Rochon a demandé au juge de ne pas sous-estimer l'importance des entreprises présentes dans la salle par l'entremise de leurs avocats. Il a affirmé que le magistrat ne devrait pas prêter foi à des arguments basés sur l'ignorance, parce qu'il s'agit d'entreprises «extrêmement sophistiquées» qui sont des «joueurs majeurs» dans l'industrie.

Aucun résidant présent

Un avocat de Lac-Mégantic, Daniel Larochelle, a joint ses efforts à ceux des bureaux de Montréal et de Toronto spécialisés en recours collectifs pour tenter de faire indemniser les victimes de la tragédie. Si le recours collectif est autorisé, elles seraient représentées par un homme dont la femme a péri dans la tragédie et par trois personnes qui ont perdu des immeubles.

Mis à part Me Larochelle, aucun résidant de la communauté touchée n'était présent, hier à Sherbrooke.

«On veut avoir un lien en téléconférence pour permettre aux gens de Lac-Mégantic d'assister aux débats en direct, a dit Me Larochelle. On a des problèmes parce qu'on a un nouveau palais de justice, avec une infrastructure qui n'est peut-être pas en place. [...] Mais ça se fera.»

Hier matin, le tribunal s'est attardé à un débat procédural sur l'admissibilité en preuve de certains documents. Par la suite, Me Rochon a présenté les grandes lignes de sa plaidoirie. L'audience se déroule en grande majorité en anglais.

Les avocats d'Ottawa et du Canadien Pacifique (CP) n'ont pas voulu commenter le dossier ou dire s'ils allaient s'opposer à la demande d'autorisation du recours collectif.