Alors que la confusion régnait jusqu'à la semaine dernière autour des sommes engagées dans la reconstruction de Lac-Mégantic, un comité interministériel a siégé pour la toute première fois, hier à Québec, en vue de remettre de l'ordre dans ce dossier.

L'État québécois a dépensé plus de 120 millions de dollars depuis la tragédie ferroviaire du 6 juillet dernier, comme l'a révélé La Presse samedi. Cette somme exclut les dizaines de millions dans les fonds de relance du gouvernement fédéral, d'Investissement Québec et de la Croix-Rouge, notamment.

Le nouveau comité, présidé par le député de Mégantic Ghislain Bolduc, vise à devenir un «guichet unique» pour répondre aux demandes des citoyens et faire le suivi de tous ces millions. «Vous voyez qu'il y a des sommes considérables d'argent, et jusqu'à présent, il n'y a pas eu de coordination de ces disponibilités-là, a-t-il dit à La Presse. C'est quelque chose qu'il va falloir mettre en place. Ça faisait partie des discussions de ce matin.»

Le ministre des Affaires municipales, Pierre Moreau, a souligné hier que la facture totale de la reconstruction reste indéterminée. Il a confirmé que Québec avait injecté 124 millions à ce jour.

«Lorsqu'on connaîtra les intentions d'aménagement à long terme de la municipalité, on sera mieux à même d'évaluer ces coûts», a expliqué le ministre Moreau en point de presse à Québec.

Selon une compilation faite par Québec et révélée dans nos pages samedi dernier, la catastrophe de Lac-Mégantic coûtera près de 410 millions aux gouvernements fédéral et provincial. L'Unité permanente anticorruption (UPAC) enquête sur la manne de contrats qui est tombée sur la ville au lendemain de la tragédie qui a fait 47 morts, a aussi appris La Presse.

Le chemin des millions

L'urgence de la situation a entraîné le versement rapide de certaines sommes à la municipalité de Lac-Mégantic, dont Québec «attend les pièces justificatives», a expliqué hier Ghislain Bolduc.

Selon le député de Mégantic, Québec a «une très bonne idée» de la façon dont a été dépensé «un très haut pourcentage» des 124 millions. «Excepté que dans certains cas, la Ville a demandé des avances au gouvernement, et les factures sont à venir.»

«On n'a pas d'évidences d'abus ou d'exagérations, a-t-il ajouté. Et comme vous le savez, l'UPAC est allée faire un tour. On ne sait pas ce qu'ils ont fait, et ce n'est pas de notre ressort. S'il y a des choses qui se passent là, les gens qui ont mal agi en subiront les conséquences, s'il y a lieu.»

Le ministre Pierre Moreau promet pour sa part que son gouvernement sera «intraitable» si l'escouade policière met au jour des stratagèmes douteux dans l'attribution de marchés publics.

«Si d'aventure des gens ont profité de la mésaventure incroyable et triste des gens de Lac-Mégantic pour essayer de s'enrichir illégalement, j'espère qu'ils seront non seulement démasqués par l'UPAC avec les moyens dont l'UPAC dispose, mais que l'État prendra tous les moyens nécessaires pour s'assurer qu'ils soient poursuivis et punis selon toute la

rigueur de la loi», a-t-il dit.

Outre Ghislain Bolduc et le ministre des Affaires municipales, le nouveau comité interministériel sur Lac-Mégantic est formé des ministres de la Sécurité publique, de la Justice, de l'Environnement, du Transport, de l'Agriculture, de l'Emploi, ainsi que du ministre délégué aux PME et au Développement économique régional.

Jonathan Santerre, fondateur et porte-parole du mouvement citoyen Le Carré Bleu Lac-Mégantic, a salué la mise en place de ce comité, lui qui dénonce depuis plusieurs mois un manque de transparence dans le dossier de la reconstruction.

«C'est très rassurant sur certains points, car cela pourra donner l'heure juste à la population qui manque de réponses sur l'état de la reconstruction. Notre député Ghislain Bolduc donne l'impression d'être l'homme de la situation pour rétablir la transparence. Par contre, le dossier de la voie de contournement semble encore être coincé.»