Bâtiments instables, piscines de pétrole, chaleur caniculaire et équipements suffocants: les conditions de travail de ceux qui oeuvrent dans la «zone rouge» de Lac-Mégantic sont tellement infernales qu'ils doivent se relayer aux 15 minutes pour éviter de s'évanouir ou de souffrir d'insolation.

C'est la Sûreté du Québec qui a rendu publique l'information, après avoir annoncé qu'elle détruira en début d'après-midi deux bâtiments sur la scène de crime.

«Ces bâtiments sont d'une grande instabilité et mettent en péril présentement le travail des policiers et des divers intervenants sur place», a indiqué Michel Brunet, porte-parole de la SQ.

Trois coups de sifflet avertiront la population de Lac-Mégantic avant le début de la démolition. «Aucun explosif ne va être utilisé. C'est une démolition mécanique», a ajouté le lieutenant Brunet. L'utilisation de dynamite est rendue impossible par la présence massive de pétrole sur les lieux.

Il n'est pas exclu que des dépouilles de victimes se trouvent à l'intérieur de ces deux bâtiments. «La raison pour laquelle on fait détruire ces deux bâtiments présentement, c'est d'être en mesure de retirer les débris et d'aller voir s'il n'y avait pas dépouilles dans les sols où on ne peut accéder présentement», a ajouté le policier. Les bâtiments se trouvent «dans le secteur» du Musi-Café, près des édifices qui ont été complètement rasés.

Chaleur et produits chimiques

Après le grand patron de la SQ samedi, c'était le tour de la porte-parole Ann Mathieu aujourd'hui de souligner à quel point les conditions de travail des policiers sur place sont extrêmement difficiles.

«Pour les gens qui travaillent sur les lieux, c'est sûr que c'est très demandant,  a affirmé Mme Mathieu. C'est sûr qu'on a des gens qui sont très en forme, mais ça reste des personnes comme vous et moi qui ont besoin de relève pour pouvoir continuer les recherches.»

Ann Mathieu a précisé qu'une quinzaine de minutes seulement séparaient chaque changement de quart.

«Nos machines vont s'occuper de ça»

Raymond Lafontaine a perdu quatre de ses proches dans la tragédie de Lac-Mégantic, mais pas sa fierté ni sa résilience.

«C'est pas du monde de Montréal qui vont faire les fouilles. On s'est entendus: c'est nos machines qui vont s'occuper de ça», lance l'entrepreneur, qui possède la compagnie d'excavation Lafontaine et fils.

Quand il a vu passer une pelle hydraulique de la compagnie montréalaise Bricon samedi, il est sorti de ses gonds. Pour lui et ses employés, le meilleur moyen de passer à travers la souffrance qui les accable est de s'activer, et il n'est pas question de laisser des entreprises extérieures leur voler du travail.

«Dans mes employés, j'ai des gens qui ont perdu leurs proches. Ils les cherchent», affirme Raymond Lafontaine. «Ils veulent travailler. Quand tu travailles, tu oublies le mal.»

Lui-même n'a pas arrêté depuis le drame, qui a emporté son fils, sa bru, la femme de son autre fils et l'une de ses employées. «Personne ne devrait vivre ça, mais pour passer au travers, il faut que tu grouilles», croit-il.

Après le passage de la pelle de Bricon, Raymond Lafontaine s'est adressé au conseil d'administration de la Montreal, Maine and Atlantic. Ils se sont entendus pour que les travaux soient effectués par des compagnies locales.

«Et si les entreprises de l'extérieur veulent venir, je peux vous assurer que ça va passer serré», prévient Raymond Lafontaine, à qui le drame n'a pas non plus enlevé l'aplomb.