Il a fait courir les policiers de plusieurs pays au printemps dernier. À partir de lundi, c'est dans une salle d'audience étriquée du palais de justice de Montréal que Luka Rocco Magnotta aura son enquête préliminaire, pour le meurtre et le démembrement de l'étudiant chinois Lin Jun, survenus le 25 mai dernier.

Magnotta, qui s'est répandu frénétiquement en photos et vidéos sur le web par le passé, demande aujourd'hui que son enquête préliminaire se tienne dans le secret d'un huis clos. C'est du moins la requête que ses avocats, Luc Leclair et Pierre Panaccio, présenteront à la juge Lori-Renée Weitzman, dès l'ouverture de la séance, lundi. Si la requête devait être accordée, le public serait exclu de la salle d'audience. Les médias contesteront cette requête, très inhabituelle d'ailleurs. «Du jamais vu», selon Me Mark Bantey, qui représentera six entreprises médiatiques, dont Gesca. Me Bantey a dit hier n'avoir trouvé qu'un seul cas où un huis clos a été imposé à l'enquête préliminaire, et c'était en 1982, avant l'adoption de la Charte et des décisions de la Cour suprême dans le domaine.

Quoi qu'il en soit, il reviendra à la juge de trancher. L'enquête préliminaire sera de toute façon frappée d'une ordonnance de non-publication, qui empêchera de publier la preuve que présentera le procureur de la Couronne Louis Bouthillier.

Cohue

Des journalistes des États-Unis et de la France ont manifesté leur intention d'assister à l'enquête préliminaire. L'exercice se tiendra dans une salle conçue pour juger plusieurs accusés en même temps, mais qui a peu de places pour le public. L'audience sera retransmise par vidéo dans une «salle de débordement» qui peut accueillir 49 personnes. On saura lundi si c'est suffisant.

Tous les journalistes, y compris ceux de l'extérieur du Canada, sont assujettis à l'ordonnance de non-publication, affirme Me René Verret, de la Direction des poursuites criminelles et pénales, au ministère de la Justice.

Accusations

Originaire de l'Ontario, Éric Clinton Newman a officiellement changé son nom pour celui de Luka Rocco Magnotta en 2006. C'est donc sous son nom d'adoption que l'homme de 30 ans sera jugé. On lui reproche d'avoir tué la victime avec préméditation, d'avoir fait outrage à son cadavre, d'avoir produit et distribué du matériel obscène, d'avoir utilisé la poste pour envoyer du matériel obscène et d'avoir harcelé Stephan Harper et les membres du gouvernement. On se souvient que des parties du corps de la victime avaient été envoyées au Parti conservateur, au Parti libéral et dans deux écoles de Vancouver.

L'enquête sur cette horrible affaire s'est enclenchée le 29 mai, quand un torse humain (celui de Lin Jun) a été trouvé dans une valise au milieu d'un tas d'ordures près de l'immeuble où habitait Magnotta, dans Côte-des-Neiges. Ce dernier avait déjà quitté Montréal pour Paris à ce moment, ce qui a donné lieu à une chasse à l'homme à l'échelle internationale.

Magnotta a été arrêté dans un café internet de Berlin, le 4 juin, lorsqu'il regardait sur le web ce qu'on disait à son sujet. Il a été extradé au Canada le 18 juin. Il est emprisonné au centre de détention de Rivière-des-Prairies, un établissement qui regroupe les accusés en attente de procès.