Pour sa première comparution en chair et en os dans une cour de justice de Montréal, Luka Rocco Magnotta est resté impassible. L'homme qui est accusé du meurtre et du démembrement de l'étudiant chinois Lin Jun, subira son enquête préliminaire en mars prochain 2013. D'ici là, les autorités pénitentiaires devront s'assurer qu'il prenne ses deux médicaments d'ordonnance, dont on ne peut divulguer la teneur.

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C'est ce qui ressort de la comparution plutôt brève, jeudi après-midi, de celui qui a été surnommé le dépeceur. L'homme de 29 ans, que les autorités veulent déplacer le moins possible, avait été amené en personne à la demande de ses avocats. L'exercice s'est tenu devant le juge Jean-Pierre Boyer. Vêtu d'un jeans et d'une chemise à manches courtes blanche à carreaux, Luka Rocco Magnotta est entré dans le grand box vitré des accusés, menotté, en regardant droit devant lui. L'homme mince, presque frêle, au teint pâle, a gardé le même air pendant toute la durée de l'audience, mais a réagi quand un de ses avocats lui a parlé. M. Magnotta est représenté par deux avocats de Montréal, Me Pierre Panaccio et Jean Dury, de même que par un avocat de Toronto, Me Luc Leclair.



Les observateurs s'attendaient à une demande d'évaluation psychiatrique, puisque cette possibilité avait été évoquée par Me Panaccio, lors de la première comparution, mardi. Mais la défense n'a finalement rien demandé à ce sujet, jeudi. Les procureurs de la Couronne, Louis Bouthillier et Hélène Di Salvo, en accord avec la défense, ont décidé de fixer la date de l'enquête préliminaire au 11 mars 2013. Celle-ci devrait durer deux semaines. L'exercice sera précédé d'une conférence préparatoire en janvier.

«Est-ce qu'il sera présent», a demandé Me Bouthillier?

«Est-ce qu'on a à décider cela maintenant», a demandé Me Leclair?

Me Leclair a ensuite enchaîné avec ses préoccupations au sujet de  l'état de santé de son client, en prison. «Il est traité correctement, mais je m'en fais au sujet de son état mental et physique. Il faudrait s'assurer qu'il ait sa médication.» Me Leclair a alors indiqué le nom de deux médicaments. Dès après, Me Bouthillier a demandé une ordonnance de non-publication, disant que la médication pourrait être un enjeu lors du procès. Le juge Boyer a alors émis une ordonnance sur les noms et le type de médicaments.

Mercis à Berlin

En point de presse, un peu plus tard, Me Leclair a amorcé son adresse en remerciant l'avocate de M. Magnotta à Berlin, et un psychiatre, qui se sont «occupés de lui de façon exemplaire à Berlin.» Rappelons que M. Magnotta est arrivé au Québec lundi soir, après avoir accepté son extradition de Berlin, où il s'était fait arrêter.

«M. Magnotta a renoncé à ses droits volontairement parce qu'il voulait revenir à Montréal pour faire face à la justice. Il fait confiance au système judiciaire canadien», a dit Me Leclair, avant d'ajouter qu'il n'y aurait pas d'autre commentaire.

Tout l'exercice s'est tenu sous haute mesure de sécurité, d'autant plus que la famille du défunt était présente dans le palais de justice. Un peu avant 13 heures, une fourgonnette du ministère de la Sécurité publique est arrivée au palais de justice toutes sirènes hurlantes. Elle était suivie par deux véhicules qui transportaient des gens d'origine asiatique. Les trois véhicules se sont rapidement engouffrés dans le stationnement souterrain de l'établissement, sous le crépitement des appareils photo des médias.

De moins en moins de place

L'affaire Magnotta a horrifié le monde entier récemment, et de nombreux médias étaient présents au palais de justice pour cette seconde comparution. Mais tous les gens du public et la plupart des journalistes ont dû se résoudre à aller dans une salle de débordement, où l'audience était retransmise par vidéo-conférence. Ceci parce que la salle d'audience était beaucoup trop petite. En fait, il reste de moins en moins de salles de bonnes dimensions pour le public, au palais à Montréal.  Au cours des derniers mois, les autorités ont démoli six salles d'audience pour les réaménager avec de grands box vitrés pour plusieurs accusés, et de nombreux bureaux pour les avocats. Résultat, il ne reste presque plus de place pour le public et les journalistes, qui en sont quittes pour suivre les procès à la télé.