La mécanique mène à tout, même à la radio. Parlez-en à Kiko, le «garagiste à la voix d'or».

Dans la vraie vie, Francisco de Jesus, alias Kiko, possède un atelier de réparation et d'installation de silencieux dans le quartier industriel de Saint-Michel. L'endroit est toujours plein et, surtout, plus festif que la moyenne des établissements du genre. Pendant que les voitures se font réparer, des haut-parleurs crachent de la musique latine à tue-tête. Entre les affiches de palmiers, les drapeaux tropicaux, les trophées de baseball et les habituels calendriers de «pitounes», c'est à se demander si on est dans un dans un garage ou dans une succursale de la Salsathèque.

«J'ai toujours aimé travailler dans l'ambiance, c'est plus motivant pour tout le monde», explique le sympathique moustachu.

Mais ce Dominicain d'origine est loin de se limiter aux silencieux troués. Dans un autre monde, disons parallèle, Kiko est aussi l'un des animateurs les plus actifs et les plus populaires de la radio latino-américaine à Montréal. Il anime actuellement quatre émissions à trois stations différentes: les jeudi et vendredi soir à la radio multiculturelle CKIN-FM, tous les jours en début d'après-midi à la radio haïtienne CPAM et, enfin, sur son propre site internet, elkiko.com, qui diffuse 24 heures sur 24.

On peut se demander comment Kiko, 55 ans, arrive à concilier ces deux carrières a priori incompatibles. Mais cet infatigable travailleur a trouvé la solution: il a fait installer un studio juste au dessus de son garage! Entre deux soudures, il lui arrive régulièrement de monter à l'étage pour faire une intervention sur sa webradio. Idem pour son émission à la radio haïtienne, qu'il diffuse directement des «Studios Kiko Mufflers». Pendant qu'en bas, les silencieux pétaradent, Kiko fait tourner des salsas et des merengues endiablés.

Positif, positif, positif

Comment en est-il arrivé à cette double vie? Une suite de hasards. Comme beaucoup de jeunes Dominicains, Francisco a appris la mécanique avant même de savoir lire et écrire. À 20 ans, il avait son garage dans la petite ville d'Higuey, dans l'est du pays. Mais quand il a appelé Radio Sol pour faire passer une annonce, le directeur de la station a aimé sa voix de baryton et lui a tout de suite proposé un micro. «J'ai essayé, j'ai trouvé ça intéressant, j'ai continué», résume-t-il.

La situation politique, en revanche, était beaucoup moins intéressante. En 1982, à l'âge de 27 ans, Kiko a déménagé ses pénates au Québec. «Disons que c'était un peu compliqué», dit-il en évoquant les longues années du régime Balaguer. «J'ai pensé qu'ailleurs, je pouvais trouver un meilleur avenir pour ma famille.»

Le «meilleur» n'est pas venu tout de suite. Kiko a travaillé dans la construction, la soudure, les manufactures et le monde agricole avant d'acheter son garage en 1996 et de revenir progressivement à la radio.

Il ne le dit pas comme ça, mais son expérience d'immigré l'a sans doute aidé à acquérir la pensée positive qu'il cultive aujourd'hui comme un mantra et qui est devenue sa marque de commerce. «On travaille trop. On pense que l'argent fait le bonheur. On laisse passer la vie, dit-il. Mais c'est un moment spécial que Dieu nous a donné. Il ne faut pas le gaspiller. Le plus important, c'est de rester positif, positif, positif.»

Son infaillible optimisme, qu'il saupoudre de rassurants conseils sur les difficultés de la vie, ont fait de lui une sorte de motivateur des ondes, un personnage clé dans la communauté latino-américaine et même chez les Haïtiens. On lui téléphone, on se confie, on lui demande quoi faire pour aller mieux.

Quant à sa voix de crooner et à ses propos ultra-romantiques, ils lui ont valu les appels de plus d'une femme. Un soir, une auditrice a même débarqué au studio de CKIN pour danser devant lui sur sa musique! «Ma femme a déjà été un peu jalouse. Mais on ne peut rien faire contre ça. Ça fait partie du métier. En fait, ça donne de l'énergie», dit-il, le plus sérieusement du monde.

Kiko sait qu'il est populaire et qu'il a beaucoup d'amis. Quand on le cuisine un peu, il avoue que la politique pourrait l'intéresser. «Si Dieu me le demande et que ça aide la communauté, je le ferai», dit-il. Mais ne lui demandez surtout pas de choisir entre les autos et les micros. Tant qu'il aura «l'énergie positive» de mener de front ses deux vies, la mécanique restera son gagne-pain et la radio, sa passion.

«J'ai des brûlures sur les bras. J'aime ça. J'aime travailler, lance-t-il en nous montrant ses cicatrices. Mais quand je suis au micro, c'est là que je me détends. C'est là que je suis relaxe...»

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Écouter Kiko

> sur CKIN (106,3): Romanticamente Kiko, jeudi de 20h à 3h, et De Fiesta con Kiko, vendredi de 20h à 3h.

> sur CPAM (1610 AM): Énergie positive, du lundi au vendredi, de 12h30 à 14h30

> www.elkiko.com: tous les jours de 10h à 23h et en reprise.

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Journée de la République dominicaine

Faute d'avoir honoré ses dettes, le Festival de merengue ne reviendra pas cet été aux Week-ends du monde du parc Jean-Drapeau. En revanche, le parc accueille le 10 juillet la toute nouvelle Journée de la République dominicaine, animée par Kiko en personne. On y verra un certain nombre de vedettes comme le chanteur de merengue Mala Fe et le roi de la bachata Freddy Antony.