Le caïd Raynald Desjardins, détenu depuis 14 mois pour le meurtre de l'aspirant-parrain Salvatore Montagna, veut être libéré en attendant la suite des procédures, a appris La Presse. Son avocat, Me Marc Labelle, a déposé une requête en ce sens à la Cour supérieure de Joliette la semaine dernière. Dans sa requête, l'avocat déplore le fait que la poursuite n'a toujours pas fini de divulguer la preuve et que celle qui lui a été remise jusqu'à maintenant est largement caviardée.

Me Labelle affirme que la très grande partie de la preuve de la poursuite repose sur un échange de communications électroniques, et que cette dernière est majoritairement circonstancielle. Il assure que son client respectera ses conditions s'il est remis en liberté, qu'il est prêt à verser une importante caution et qu'un engagement hypothécaire sera présenté par un membre de sa famille.

Parallèlement, le criminaliste a déposé une autre requête, dans laquelle il demande d'obtenir les affidavits qui ont permis à la police d'obtenir d'un juge que les conversations privées de son client soient captées, entre décembre 2010 et mai 2012 - donc avant et pendant sa détention.

«Le requérant est représenté par des avocats depuis le tout début des procédures entamées contre lui et il a communiqué avec eux de façon régulière et à d'innombrables reprises. En toute logique, il est possible d'en arriver à la conclusion que la stratégie de défense du requérant a été interceptée et est maintenant connue de la partie adverse, ce qui contrevient aux règles de justice naturelle», écrit Me Labelle.

Les deux requêtes seront débattues au cours des prochains jours. Rappelons que l'un des coaccusés de Raynald Desjardins, son lieutenant Vittorio Mirarchi - représenté par le réputé criminaliste torontois Edward Greenspan -, a demandé et subi une enquête sur remise en liberté. Celle-ci lui a été refusée sans détour par le juge Marc David, de la Cour supérieure.

Les procédures promettent d'être longues pour les accusés du meurtre de Salvatore Montagna, parmi lesquels il semble y avoir des dissensions sur la stratégie à adopter. Au moins deux des avocats de la défense qui étaient présents au début des procédures ont demandé à être remplacés au cours des dernières semaines.

Au coeur de la tempête

Selon l'une des théories de la police, Raynald Desjardins, son beau-frère Joe Di Maulo, le chef de clan Giuseppe «Ponytail» De Vito, Salvatore Montagna, les frères Domenico et Antonino Arcuri et d'autres individus ont tenté de prendre le contrôle du crime organisé italien après la chute des Rizzuto en 2010. Mais un conflit a éclaté au sein de ce «consortium», qui s'est alors scindé: le groupe de Desjardins d'un côté, celui de Montagna de l'autre. C'est dans ce contexte que Desjardins aurait été victime d'une spectaculaire tentative de meurtre à Laval, le 16 septembre 2011, et que Montagna a été tué, deux mois plus tard.

Un troisième joueur, inattendu, s'est invité au bal: Vito Rizzuto, libéré de prison le 5 octobre après huit ans de détention. Selon plusieurs sources des milieux policier, criminel et judiciaire, ce dernier a amorcé une offensive pour reprendre le contrôle de la mafia. Depuis l'automne dernier, les clans qui auraient manqué de loyauté aux Siciliens ont subi plusieurs attaques. Raynald Desjardins a perdu son beau-frère, Joe Di Maulo, tué à Blainville le 4 novembre, et son grand ami, Gaétan Gosselin, abattu en plein coeur du fief du caïd, en janvier dernier.

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