Marc Gascon, maire de Saint-Jérôme, a dévoilé hier, par l'intermédiaire d'un cabinet d'avocats montréalais payé par les contribuables de Saint-Jérôme, deux factures très sommaires des rénovations majeures effectuées à sa résidence privée.

La firme Woods a été «mandatée» par la Ville de Saint-Jérôme, qui va aussi payer les honoraires, a confirmé à La Presse le cabinet du maire. Au moment d'écrire ces lignes, le montant des honoraires ne nous avait pas été communiqué.

C'est dans les bureaux de la firme d'avocats que La Presse a consulté les factures promises depuis le 11 novembre, les photocopies de deux chèques visés correspondant aux paiements, ainsi que les comptes de taxes. Soit six feuilles au total. Il nous a été interdit de les photocopier ou de les photographier.

«Je ne souhaite pas que mes papiers personnels puissent se retrouver sur des sites internet et dans les mains de n'importe qui», se justifie le maire dans un communiqué.

«Inhabituel et spécial», a commenté le député péquiste de Prévost, Gilles Robert. Il estime «assez particulier» le fait que ce soit la Ville et ses contribuables qui assument cette dépense de nature privée.

Un avis partagé par l'opposant Andrew Hattem, du parti Vision Saint-Jérôme. Il déplore une «nouvelle esquive du maire Gascon. Si c'est la Ville qui assume, ces factures devraient être disponibles aussi pour la population».

Jusqu'à vendredi, le service des communications de la Ville a toujours répété que tout ce qui concernait la maison du maire ne relevait pas de l'administration municipale.

Peu de détails

Les deux factures consultées ne contiennent aucune information sur la nature des travaux effectués, ni le nom des sous-entrepreneurs.

La première facture est datée du 30 septembre 2008, alors que les travaux sont «effectués à 55%». Son montant de 126 024,94$ taxes incluses a été réglé par chèque signé par la conjointe du maire et débité le 28 octobre. Aucun acompte n'avait été versé.

La seconde, datée du 16 décembre 2009, de 66 870,32$, n'a été payée que le 28 mai 2010. Soit cinq mois et demi plus tard.

«C'est clair que le maire semble avoir profité d'un traitement de faveur», estime Andrew Hattem.

Au final, la maison de Marc Gascon aura coûté officiellement 20 000$ de moins que l'estimation originale (203 000$ HT). Les deux chèques combinés représentent la somme toutes taxes comprises de 192 894$.

Des liens très étroits

Le 10 novembre dernier, La Presse a révélé qu'au moins trois entreprises ayant des liens d'affaires étroits avec la Ville avaient été embauchées par le maire pour transformer son modeste bungalow en résidence de prestige. Marc Gascon était aussi parti en voyage à Las Vegas en compagnie de ces mêmes entrepreneurs lors d'un congrès sur le béton.

L'entrepreneur principal, L'Archevêque & Rivest, est spécialisé dans les réalisations industrielles et institutionnelles. Il a notamment bâti le poste de police de Saint-Jérôme. Un des dirigeants avait précisé à La Presse qu'il construisait très rarement des résidences privées et pour des amis solvables.

Le lendemain de la publication de nos reportages, le maire avait promis de communiquer ses factures.

Il avait aussi soutenu que la Ville n'avait plus de lien avec l'entrepreneur général lorsque ce dernier construisait sa maison. Or, Marc Gascon négociait avec L'Archevêque & Rivest la construction et la gestion d'un nouvel aréna au moment même où les ouvriers de cet entrepreneur s'activaient dans sa maison.

Andrew Hattem, qui évoque des «rumeurs persistantes de l'implication de la brigade Marteau», dit que le «maire Gascon continue de ne pas vouloir être transparent». «J'ai demandé au ministère des Affaires municipales de suspendre le comité exécutif le temps que leurs vérifications administratives soient faites.»

La Ville de Saint-Jérôme est la cible d'une vérification administrative de Québec depuis septembre dernier à la suite d'une succession de plaintes et «d'anomalies».