Empêcher les militaires canadiens d'avoir des relations sexuelles entre eux dans une zone de combat est une guerre perdue d'avance contre la nature humaine, selon des experts.

Le commandant en chef des troupes canadiennes en Afghanistan, le brigadier-général Daniel Ménard, a été relevé de ses fonctions, la semaine dernière, à cause d'une relation «inappropriée» avec une militaire.

Selon les autorités militaires, cette relation -dont on ignore encore tous les détails- allait à l'encontre de la stricte interdiction des relations sexuelles dans la zone de combat en Afghanistan.

Selon Sue McGarvie, une sexologue qui a soigné des dizaines de militaires, le besoin d'avoir des relations intimes est programmé par 100 millions d'années d'évolution. Elle se dit étonnée de voir que les autorités attendent de ses soldats aient un comportement de robot alors qu'ils sont souvent dans des situations difficiles et qu'ils ont souvent le besoin d'être réconfortés.

«On ne peut pas combattre cela: mettez des adultes ensemble dans n'importe quelle situation et vous aurez des relations sexuelles et de l'intimité», a illustré la sexologue.

Alors que certains experts en défense et même des soldats disent que des règlements pour encadrer les relations entre les membres de l'armée sont nécessaires pour assurer la discipline, Mme McGarvie se dit «horrifiée» par ses ramifications.

«Tu perds ta carrière parce que tu es tombé en amour? C'est une situation horrible», s'est-elle exclamée.

Le colonel à la retraire Michel Drapeau, aujourd'hui professeur de droit à Ottawa, fait appel au «bon sens», soulignant lui aussi que les militaires ne sont pas des robots.

Sous le couvert de l'anonymat, un officier, qui collabore avec les haut-gradés de la mission canadienne en Afghanistan, s'est dit partisan de l'interdiction.

Il affirme qu'il existe un danger plus grand: certains officiers, choisis en raison de leur courage et de leur acharnement, peuvent développer un complexe de «Dieu».

«Si tu as affaire avec des talibans et que tu dois gérer des morts, tu n'es pas un type de gars normal -cela prend une personnalité spéciale pour être comme cela et pour être capable de gérer cela», a soutenu l'officier anonyme.

L'envers de la médaille est que ces officiers combattent leur propre démon, parfois par l'alcool ou le sexe. «Ces militaires doivent trouver d'autres façons d'évacuer le stress», a soutenu le représentant de l'armée.

Le psychologue du sport qui a travaillé avec plusieurs athlètes d'élite et équipes sportives professionnelles, Saul Miller, estime que les hommes de stature peuvent être en proie à un sentiment d'auto-importance exagéré.

Et cela représente un «mélange toxique» lorsque jumelé avec une libido «très puissante».

«Certains hommes dans des positions de pouvoir -comme certains généraux ou commandants ou encore des vedettes de la NBA ou de la NFL qui sont payés des dizaines de millions de dollars- croient qu'ils sont spéciaux et qu'ils détiennent un permis pour transgresser des lois morales», a expliqué le psychologue en direct de Vancouver.

«Malheureusement, leurs croyances sont renforcées par l'adulation que plusieurs gens leur voue.»

Le règlement canadien interdisant aux militaires d'avoir des relations entre eux est l'un des plus sévères parmi les différents pays présents en Afghanistan. Même l'armée américaine a assoupli ses règles dans ce domaine.