Des documents qui pourraient faire la lumière sur le traitement des détenus afghans sont coincés dans des conteneurs à l'aérodrome de Kandahar, ralentissant le travail de la commission qui se penche sur le dossier.

Plus de deux ans après la mise sur pied d'une enquête publique sur le sort des prisonniers, les militaires doivent toujours mettre la main sur les documents et les envoyer au Canada.

Des piles d'ordonnances de transferts de détenus afghans sont plutôt «toutes jetées dans un conteneur maritime» à la base militaire. C'est du moins ce qu'à révélé le major Denis Gagnon lors de son témoignage devant la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire, mardi.

Les ordonnances de transferts pourraient démontrer si les commandants de l'armée canadienne étaient conscients des risques de torture lorsqu'ils remettaient des détenus aux autorités afghanes.

Le major Gagnon n'était pas en mesure de dire quand la commission recevrait les documents.

«Les documents sont encore plus difficiles à trouver en raison du roulement de personnel, a-t-il expliqué. De plus, avec le rythme actuel de nos opérations, il est difficile de libérer des effectifs pour bien identifier tous les documents, qui pourraient être mêlés à bien d'autres documents.»

Selon le major Gagnon, l'armée a mandaté une équipe pour se rendre à l'aérodrome de Kandahar afin de déterminer dans combien de temps les documents seront disponibles.

Le président par intérim de la commission, Glenn Stannard, a demandé pourquoi les documents n'ont pas été envoyés avec ceux qui ont déjà été remis à la commission.

«Je n'ai pas de réponse à vous donner, monsieur», a rétorqué le major Gagnon.

Les ordonnances de transferts ne représentent qu'une partie de toute la documentation coincée dans un embouteillage bureaucratique qui menace de paralyser l'enquête publique.

Le major Gagnon a expliqué qu'une équipe spéciale du ministère de la Défense est à éplucher ces documents, à la recherche d'informations dites «délicates».

Cette équipe a remis 1723 pages à la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire depuis février 2009. Des milliers de pages sont toujours en attente.

Les responsables du ministère de la Défense peuvent décider quels documents tombent sous la juridiction de la commission -et lesquels y sont soustraits.

L'avocat de la commission, Ron Lunau, a fait valoir qu'il est impossible de vérifier si tous les documents pertinents sont dévoilés.

Le brigadier-général Richard Blanchette a insisté sur le fait que l'armée fait son travail «adéquatement» et trouve l'équilibre entre les informations nécessaires à l'enquête et la protection de la sécurité des troupes sur le terrain.

Un avocat du gouvernement a déjà affirmé devant la commission qu'il pourrait se passer des mois, voire des années avant que certains des documents soient remis.

L'embouteillage menace l'enquête, puisque la commission ne peut pas obtenir les documents nécessaires avant d'entendre les témoins pertinents.

Le transfert de détenus aux autorités en sachant que ceux-ci pourraient être torturés est considéré comme un crime de guerre.