Un officier canadien accusé d'avoir tué un taliban grièvement blessé et désarmé en octobre 2008 en Afghanistan a plaidé non coupable mercredi devant une cour martiale à Gatineau au Québec.

Le capitaine Robert Semrau a été arrêté le 31 décembre 2008 et accusé de meurtre sans préméditation, puis remis en liberté conditionnelle une semaine plus tard.

L'officier de 36 ans est accusé de «coups de feu tirés avec l'intention de donner la mort sur un homme désarmé». Il risque la prison à vie, ce qui au Canada équivaut pratiquement à 25 ans de réclusion.

Selon des documents militaires acceptés par l'accusation et la défense, les faits remontent au 19 octobre 2008.

La patrouille conduite par Semrau a été attaquée par des combattants talibans dans la province de Helmand, au sud de l'Afghanistan. Après l'intervention d'un hélicoptère américain, le groupe a découvert un taliban mort et un autre grièvement atteint, dont les blessures «paraissaient trop graves pour tout type de traitement sur place».

Toujours selon le document, «au moins un témoin dit avoir vu le capitaine Semrau tirer avec son fusil sur l'insurgé gravement blessé».

Lors de l'ouverture du procès, le procureur a affirmé que l'homme blessé a été «insulté, qu'on lui a craché dessus et qu'il a été frappé à coups de pied» par des soldats afghans du détachement du capitaine Semrau. On lui a ensuite pris son fusil, ses munitions et sa veste avant de le laisser «entre les mains d'Allah».

L'homme était «toujours vivant, bougeait lentement et gémissait», a ajouté le procureur Thomas Fitzgerald.

Le capitaine Semrau est retourné sur les lieux peu de temps après, accompagné d'un soldat et d'un interprète afghan, pour prendre des photos du blessé et du mort.

C'est à ce moment que Semrau aurait demandé aux deux autres de quitter l'endroit puisqu'ils «n'avaient pas à voir ça», a dit le procureur. Les deux hommes se sont éloignés des lieux et ont ensuite entendu deux coups de feu.

Croyant être la cible d'une nouvelle embuscade, le soldat est revenu sur les lieux, arme à la main, pour découvrir que le taliban blessé ne bougeait plus.

Plus tôt, le capitaine Semrau avait reçu par radio l'ordre d'un supérieur de soigner le taliban blessé et de le transporter à l'hôpital.

Semrau aurait dit au soldat qui l'accompagnait qu'il «n'aurait pas pu vivre avec sa conscience s'il avait abandonné un homme blessé et que personne ne méritait de souffrir comme ça».

Il aurait aussi ajouté plus tard que «n'importe qui aurait fait la même chose pour tout être humain dans cette situation».

Ni le droit canadien ni le droit international n'admettent le concept de meurtre par compassion.

Semrau avait rejoint l'armée canadienne en 2005 après avoir servi pendant plusieurs années dans les forces britanniques et sa carrière militaire avait été sans reproche.

Son procès risque de durer plusieurs mois.