Échaudés depuis un mois par la controverse autour de la remise de détenus aux autorités afghanes, les conservateurs de Stephen Harper ont réussi à faire avorter, hier, les travaux du comité ad hoc sur l'Afghanistan, faisant un pied de nez à l'opposition.

Libéraux, néo-démocrates et bloquistes avaient convoqué d'urgence, la semaine dernière, une rencontre extraordinaire du comité. Histoire de battre le fer pendant qu'il est chaud, ils souhaitaient que ses travaux se poursuivent même si la Chambre des communes ne siège pas jusqu'au 25 janvier.

 

Or, aucun des six députés conservateurs membres du comité ne s'est présenté à la rencontre fort attendue, hier après-midi, qui devait servir à organiser les prochains témoignages et à fixer les dates de séance. Faute du nombre minimal de participants pour procéder, la séance a été suspendue jusqu'à nouvel ordre.

Pluie de critiques

«Où sont les députés? C'est une insulte! a lancé, furieux, le député du NPD, Paul Dewar. C'est une continuité, pour ce gouvernement qui tente de cacher les faits en nous empêchant de voir les documents et en empêchant maintenant le comité de faire son travail.»

Pour le député du Bloc québécois Claude Bachand, les conservateurs «bafouent la démocratie» en omettant de se présenter, un geste rarissime dans les comités parlementaires. «S'ils n'avaient rien à cacher, ils ne se cacheraient pas», a pour sa part renchéri le libéral Ujjal Dosanjh.

Sur les ondes de CTV, le secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Laurie Hawn, a défendu la décision des députés conservateurs en affirmant qu'il n'y avait «aucune urgence» à tenir cette rencontre avant Noël.

Après avoir causé l'ajournement des audiences de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire, en octobre, le gouvernement conservateur a refusé de répondre à chacune des demandes des partis de l'opposition, qui ont réclamé d'abord une enquête publique sur la question, puis la publication de tous les documents, non censurés, liés au dossier.

«En refusant de se plier à la volonté du Parlement, le gouvernement conservateur viole la Constitution de ce pays», a affirmé hier M. Dosanjh.

Témoignage-choc

La controverse avait été attisée à la mi-novembre par le témoignage-choc du diplomate Richard Colvin, qui a affirmé devant le comité que le Canada s'était rendu complice d'un système généralisé de torture en Afghanistan.

Le gouvernement a toujours affirmé qu'il n'y avait aucune preuve selon laquelle des prisonniers remis par le Canada aux autorités afghanes auraient été torturés.

Or, la volte-face, la semaine dernière, du général Walter Natynczyk, qui a dit qu'il y avait eu au moins un détenu maltraité par les Afghans, a mis les conservateurs dans l'embarras. Les plus récents sondages ont même montré une baisse dans l'appui populaire au gouvernement Harper.