À l'aube des élections de mi-mandat, le clivage droite-gauche n'a jamais été aussi prononcé aux États-Unis. Un gouffre sépare les républicains et les démocrates.

On retrouve des membres des deux allégeances parmi les dizaines d'Américains chez les Alouettes. Et contrairement à ce que l'on observe souvent dans leur pays, ils sont capables de faire la part des choses. La plupart d'entre eux considèrent injuste et regrettable le traitement réservé à Barack Obama depuis qu'il est président.

«Ça dépasse souvent les bornes - d'un côté comme de l'autre. Les critiques envers George Bush ont été brutales, et ça s'est poursuivi avec Obama», estime Ben Cahoon, délégué du Parti républicain dans l'Utah.

«On ne peut plus prendre la moindre décision sans être critiqué férocement. Accepteriez-vous de soumettre votre famille à ça? Si les choses ne changent pas, il n'y aura que des mégalomanes qui voudront devenir des hommes d'État», poursuit Cahoon.

Comme bien des observateurs, Anwar Stewart croit que les républicains en mettent souvent plus que le client en demande. «Ils ont été extrêmement durs avec Obama. Ils essaient de regagner la majorité des sièges de n'importe quelle façon, entre autres avec l'aide du Tea Party. Heureusement, Obama aura deux autres années afin de renverser la vapeur.»

Les médias américains n'ont eux aussi jamais été autant partisans, du Rolling Stone, qui a fait le procès d'à peu près tout ce qui est républicain, jusqu'à FOX News, dont le ton méprisant frôle parfois la propagande anti-démocrate.

«Les cotes d'écoute de FOX News n'ont jamais été aussi bonnes et sont les plus élevées. Les gens estiment que ce réseau est plus objectif que certains de ses concurrents, même s'il a ses défauts. Cela dit, ce serait bien s'il existait un média qui offrait une couverture objective», analyse Cahoon.

«La politique est un sport salaud, et les républicains n'ont rien d'autre que leurs intérêts à coeur. Tous les moyens sont donc bons afin d'arriver à leurs fins, y compris la propagande par l'entremise de FOX News ou du Tea Party», tranche Stewart, qui croit qu'Obama avait un défi impossible à relever à son arrivée à la Maison-Blanche.

«Lorsque Bush a pris le pouvoir, tout fonctionnait assez bien. Ce n'était pas du tout le cas pour Obama. Il était impossible de régler tous les problèmes du pays en deux ans.»

Mais selon Cahoon, Obama n'a pas fait ce qui était attendu de lui. «Il a été inefficace. Il a sciemment trompé les gens. Il avait promis qu'il négocierait la réforme du système de santé devant les caméras, et qu'il n'utiliserait pas de moyens détournés pour obtenir ce qu'il voulait. Ça ne s'est pas du tout passé comme ça. Il n'a pas tenu parole. Personnellement, ça me dérange. Ce que j'exige des politiciens, c'est de l'intégrité.»

Santé et impôts

Anthony Calvillo a suivi de près le dossier de la réforme du système de santé aux États-Unis, lui dont la femme a lutté contre un cancer, il y a quelques années.

«On déteste voir la moitié de sa paie disparaître en impôts (au Canada), mais on constate les bienfaits du système lorsque la maladie nous frappe. On n'a pas reçu un seul compte lorsque ma femme a eu son cancer. On n'aurait pas vécu cette épreuve de la même façon si on avait dû faire face à un stress financier.»

Contrairement à son quart-arrière, Cahoon ne croit pas que la gratuité du système de santé est souhaitable.

«Le rôle du gouvernement devrait être limité. J'ai récemment entendu à la radio qu'il y avait presque autant de bureaucrates qui gèrent le système de santé que de personnel médical au Québec. Il y aurait 108 000 employés qui font partie du personnel soignant et 100 000 bureaucrates. C'est un excellent exemple des problèmes qu'occasionne un gouvernement trop imposant», dit-il.

«Je veux que l'impact du gouvernement sur ma vie et mon portefeuille soit le plus minime possible. Ça me fait plaisir de payer des impôts pour les routes, les infrastructures, les policiers, etc. Mais j'aime un peu moins qu'on prenne de l'argent de ma poche pour le gaspiller de cette façon. On devrait tous subvenir à nos besoins par la sueur de notre front. Lorsque c'est trop facile d'obtenir ce que l'on veut du gouvernement, on devient souvent paresseux. Ce n'est pas sain pour une société.»

À ne pas inviter au même brunch que Françoise David et Amir Khadir...

Photo: André Pichette, La Presse

La plupart du temps, les seuls commmentaires des joueurs des Alouettes et du Canadien traitent des parties, des entraînements, des alignements, des blessures et des classements. Nous n'avons que trop rarement l'occasion de les entendre parler de sujets sérieux. C'est pourquoi je suggère à La Presse de renverser cette tendance. Avec les élections américaines de mi-mandat, au début de novembre, et la présence de plusieurs Américains chez le CH et les Alouettes, l'occasion est belle pour discuter avec eux de leurs opinions sur leur pays, le bilan de Barack Obama, la montée actuelle de la droite et leurs sentiments vis-à-vis les politiques très différentes du Québec. Sur la photo, Claude-André Mayrand, le lecteur à l'origine de cette idée (à droite), accompagne Miguel Bujold pour l'un des reportages sur ce sujet dans le cadre d'un numéro exceptionnel, La Presse est à vous.