Jack Layton n'était pas malade pendant la campagne électorale et rien ne laissait présager ce qui allait se passer dans les mois suivants, assure sa veuve, Olivia Chow, qui brise le silence deux semaines après la mort du chef du NPD, emporté par le cancer à l'âge de 61 ans.

«Il avait de plus en plus d'énergie chaque jour pendant la campagne, confie Mme Chow en entrevue à La Presse. Il s'entraînait entre une demi-heure et une heure tous les jours. Juste à le regarder faire, j'étais fatiguée.»

Si elle concède qu'il était «trop occupé» pour consulter des médecins pendant la campagne, elle assure que M. Layton se sentait bien, même dans les semaines suivant la victoire historique du 2 mai, alors que le NPD est devenu pour la première fois de son histoire l'opposition officielle à la Chambre des communes après avoir enlevé 103 sièges.

Pas de fatigue

«Il n'était pas fatigué après la campagne, soutient Mme Chow, elle-même députée néo-démocrate d'une circonscription torontoise. Des élections, la formation du caucus, la session parlementaire avec tous ces nouveaux députés, notamment du Québec, c'était passionnant. Et il n'était pas fatigué. Pas du tout.»

Selon elle, même s'il se promenait toujours avec une canne depuis une opération à la hanche, en mars, M. Layton se sentait encore en forme à la mi-juin, lors du congrès du NPD à Vancouver, où il s'était même permis quelques pas sur la piste de danse.

C'est après que les choses se sont gâtées, raconte Mme Chow. «Dans les derniers jours de travaux parlementaires, il a commencé à être plus souffrant, dit-elle. Le soir de la fête à Stornoway [un cocktail du chef de l'opposition officielle, le 28 juin], ça s'était empiré.» Au début de juillet, M. Layton est apparu dans quelques événements publics, surtout dans sa circonscription, au centre-ville de Toronto.

«Nous avons fait des examens à l'hôpital, à Toronto, explique celle qui était mariée au chef néo-démocrate depuis 1988. Et ça prend un petit bout de temps avant d'avoir les résultats. Puis il a annoncé qu'il se retirait.»

De quel mal était-il atteint, le 25 juillet, lorsque, amaigri, affaibli, la voix brisée, il a annoncé qu'il quittait «temporairement» la vie politique pour soigner un deuxième cancer? Olivia Chow refuse de le dire. Pas question non plus de parler des traitements qu'il subissait pour ne pas, dit-elle, décourager des patients atteints du même type de cancer.

«C'était le souhait de Jack de ne pas parler des détails, explique Mme Chow. Si on commence à décrire les traitements ou si on parle du cancer qui a tué Jack, ça pourra affecter des patients et ils risqueraient de perdre espoir. Les traitements peuvent fonctionner pour bien des gens. Et si ça n'a pas marché pour Jack, ça ne veut pas dire que ça ne marchera pas pour d'autres.»

«Ce n'est tout simplement pas juste pour les autres, ajoute-t-elle. Toutes les cellules cancéreuses sont différentes; parfois on peut les vaincre, parfois pas. Il y a certaines choses dans la vie qu'on ne peut pas contrôler. La mort en est une.»

Touchée par les témoignages

Sereine, émue et touchée par les milliers de témoignages reçus depuis la mort de son mari, le 22 août, Mme Chow est convaincue que le travail entamé par Jack Layton pour faire du Canada «un meilleur pays» se poursuivra.

Si elle entend rester en politique et continuer de défendre les valeurs de justice sociale, d'équité et de générosité si chères au défunt chef néo-démocrate, elle n'aspire toutefois pas à lui succéder à la tête du parti qui a célébré cette année son 50e anniversaire. «Je ne me vois pas faire ça», dit-elle.

Mme Chow n'entend pas non plus prendre position dans la course à la direction qui sera vraisemblablement lancée très prochainement.

«La ou le prochain chef aura ses propres forces. L'important, c'est qu'on travaille tous ensemble et qu'on demeure unis», se contente-t-elle de conclure.