Alors que l'eau de la rivière Richelieu s'est mise à remonter en Montérégie, un nombre croissant de sinistrés sont en détresse psychologique. Jusqu'à maintenant, 60 citoyens ont dû être recommandés pour un suivi psychologique étroit alors qu'ils étaient seulement une vingtaine la semaine dernière.

Travailleuse sociale au centre de santé et de services sociaux (CSSS) Haut-Richelieu-Rouville, Deena Butler confirme que le nombre de personnes en détresse augmente. «L'accumulation de stress à long terme, c'est dur pour les sinistrés, dit-elle. Nous, on les écoute. On les réfère à des ressources professionnelles si nécessaire.»

Tous les matins depuis le début des inondations, des équipes de soutien psychosocial du CSSS du Haut-Richelieu-Rouville se rendent dans les 20 municipalités aux prises avec des inondations historiques pour épauler les sinistrés.

«Les sinistrés ont beaucoup de stress à évacuer. On leur fait comprendre que leur angoisse est normale. C'est la situation qui ne l'est pas», dit Erin Milroy, travailleuse sociale au CSSS.

Hier, l'eau du Richelieu a augmenté de 16 cm. Et on prévoit que cette hausse se poursuivra aujourd'hui. Michael Ramsay, du service incendie de Noyan et Clarenceville, confirme que le fait que l'eau augmente «ajoute au stress des gens». «Ils sont fatigués. Cette nouvelle hausse, c'est de trop», dit-il. Les employés municipaux, qui travaillent de longues heures depuis le début des événements et dont plusieurs sont aussi sinistrés, sont également au bout du rouleau.

Le résistant

Habitant seul avec sa femme au bout d'une rue complètement évacuée de Clarenceville, Jean-Guy Baribeau est exactement le genre de client que visitent les employés du CSSS Haut-Richelieu-Rouville. Mais se rendre au domicile de M. Baribeau est si périlleux que les employées n'ont pu y aller jusqu'à maintenant.

La Presse est allée à la rencontre de ce retraité de 69 ans. Pour atteindre sa magnifique propriété, il faut marcher un bon kilomètre dans l'eau. La route, trop instable, est fermée à la circulation. En chemin, toutes les maisons sont abandonnées. «Tout le monde est parti! Moi je reste», reconnaît M. Baribeau.

Ce sinistré a dû évacuer de force sa maison il y a quelques jours, car la situation devenait intenable. L'eau était si haute que le rez-de-chaussée de M. Baribeau était complètement inondé. Mais à peine parti, M. Baribeau est revenu. Aujourd'hui, son plancher de bois franc est fortement gondolé.

Même s'il avoue craindre les moisissures, M. Baribeau refuse de quitter sa demeure. Et si l'eau monte encore, il ne bougera pas. «Je suis optimiste de nature. Je me dis que le pire est passé», dit-il.

En attendant que l'eau ne disparaisse, M. Baribeau habite au deuxième étage de sa résidence. «On ne se sent pas prisonnier. S'il y a quoi que ce soit, on peut marcher et partir. Ceux qui s'inquiètent pour moi s'en font pour rien», dit-il.

Quelques minutes avant l'arrivée de La Presse, l'équipe du CSSS a téléphoné à M. Baribeau pour savoir si tout allait bien. «Je leur ai dit à elles aussi. Tout va bien», martèle M. Baribeau.