Le comportement du gardien de nuit et les erreurs des pompiers ont contribué au «désastre» meurtrier qui a coûté la vie à 32 aînés dans l'incendie de la résidence du Havre à L'Isle-Verte, en janvier 2014. Le coroner vétéran Cyrille Delâge, chargé de faire la lumière sur ce drame n'a pu établir avec certitude l'origine de l'incendie, mais montre quand même du doigt plusieurs facteurs qui ont causé cette tragédie.

Un gardien de nuit fautif

Le gardien de nuit Bruno Bélanger avait pour principale fonction d'assurer la sécurité des résidants durant la nuit. Il a complètement échoué, a sévèrement conclu le coroner Delâge dans son rapport. Il dénonce «l'absence de toute tentative pour sauver les résidants» de la part de M. Bélanger.

«Ce témoin a un sérieux problème de crédibilité», a ajouté le coroner. Ce problème n'a pas facilité l'enquête sur les causes réelles de l'incendie: M. Delâge rappelle le «vieux principe toujours d'actualité selon lequel «les pauvres témoins font une pauvre justice».

Une intervention problématique

Le rapport n'y va pas non plus de main morte pour aborder le comportement des pompiers le soir du drame. Le patron du service, Yvan Charron, en prend pour son grade.

«Le chef Charron, qui bénéficie de la protection de la clause dite "grand-père", n'a pas la formation requise pour exercer cette fonction et il l'a démontré de façon évidente le soir du 23 janvier 2014», tranche le coroner. Ce dernier reproche aussi au chef pompier d'avoir tardé à appeler des renforts et de ne pas avoir rapidement établi de poste de commandement.

Des normes violées

La résidence du Havre ne respectait pas les normes légales, selon le coroner Delâge.

«La phase I de ce complexe abritait au rez-de-chaussée un certain nombre de personnes non autonomes et d'autres d'un âge très avancé et dont la mobilité était, à mon avis, discutable, a-t-il écrit. Voilà une première erreur lourde de conséquences.» Ce problème aurait pu être quelque peu compensé par une action rapide et efficace du gardien de nuit. 

Accidentel... et mystérieux

S'il distribue les critiques, Cyrille Delâge n'a pas été en mesure d'établir clairement comment le feu s'est déclenché à l'intérieur de la résidence. Incident dans la cuisine où se trouvait le gardien de nuit? Gaffe d'un résidant qui fumait la cigarette?

L'incendie doit être considéré comme accidentel «pour l'instant». «Tant et aussi longtemps que le point d'origine et la cause la plus probable d'un incendie ne sont pas scientifiquement ou objectivement établis, on ne peut éliminer l'incendie volontaire, bien que rien ne nous dirige vers cette éventualité au moment d'écrire ces lignes», écrit M. Delâge dans son rapport.

Installation de gicleurs

Québec obligera l'installation de gicleurs dans toutes les résidences pour personnes âgées, à l'exception des plus petites. Il prépare un programme de subventions pour aider «les résidences qui ont des difficultés», a indiqué le ministre de la Santé, Gaétan Barrette. L'an dernier, son ministère estimait à 80 millions la facture de l'installation de gicleurs. En réaction au rapport Delâge, le premier ministre Philippe Couillard a affirmé qu'«il y a clairement des choses qui doivent être faites». La ministre de la Sécurité publique, Lise Thériault, a renchéri: «Le rapport ne sera pas tabletté, on va y donner suite.»

La mairesse satisfaite

Ursule Thériault a indiqué que la municipalité de L'Isle-Verte était satisfaite de l'enquête effectuée par le coroner Delâge et du document qui en découle. «Ce rapport est honnête et nous fait état de l'ensemble des éléments qui se sont produits ce soir-là», a-t-elle dit en entrevue téléphonique.

La mairesse a ajouté que ses pompiers n'avaient pas entendu la présentation du rapport pour commencer à mettre à jour leur formation. Le chef pompier Charron a commencé une mise à niveau il y a quelques jours, a-t-elle dit. «Mais vous savez, les pompiers ont été confrontés à un défi extraordinaire...»