L'entrepreneur en maçonnerie Paul Sauvé accuse la Commission de la construction du Québec (CCQ) de le harceler, surtout depuis qu'il a publié un livre dans lequel il prône son abolition. Si bien qu'aujourd'hui il envisage sérieusement d'intenter une poursuite de plusieurs millions contre cet organisme et sa PDG, Diane Lemieux, a appris La Presse.

On assiste à un véritable bras de fer par lettres d'huissiers et d'avocats interposés entre le bouillant entrepreneur et les inspecteurs de la Commission.

«Diane Lemieux, la présidente de la CCQ, est partie en guerre contre moi», soutient Paul Sauvé en entrevue.

La CCQ menace depuis le début du mois de décembre de suspendre les travaux de rénovation que Paul Sauvé a entrepris dans un entrepôt qu'il loue sur le chemin de la Côte-de-Liesse pour y mettre son matériel. Il s'agit de travaux d'électricité, de menuiserie, de plomberie, de peinture, etc., d'une valeur de 25 000 $ selon l'entrepreneur. «Ils ont exigé les contrats par corps de métier, font des inspections quasi quotidiennes, proteste Paul Sauvé. Une vérification de fond pour un si petit contrat?»

Mais la CCQ a plusieurs autres dossiers dans sa ligne de mire.

«Il ne s'agit pas de harcèlement, réplique Louis-Pascal Cyr, conseiller de Diane Lemieux. J'ai fait faire des vérifications et je peux dire que toutes nos interventions sont justifiées. Je ne peux en dévoiler les raisons pour préserver la confidentialité des dossiers. Chaque fois qu'on constate une irrégularité, on accompagne l'entreprise en question jusqu'à ce que ces situations soient réparées. C'est notre mode de fonctionnement.»

Cette lutte pourrait se transporter très bientôt devant les tribunaux, prévient Paul Sauvé, qui déplore des «conséquences néfastes» sur ses activités. «L'attitude de la CCQ et la mauvaise presse que cela entraîne jettent une ombre sur l'entreprise.»

«On fera valoir notre point de vue devant le juge», répond Louis-Pascal Cyr.

Selon Paul Sauvé, la CCQ lui fait payer son franc-parler, en raison notamment des liens étroits qu'elle a toujours avec la FTQ, qui «est infiltrée par le crime organisé», ajoute-t-il, en référence aux reportages passés sur ce sujet.

Menaces et vols

L'entrepreneur en maçonnerie est l'auteur du livre L'industrie de la corruption. Dans cet ouvrage, publié au mois de novembre dernier, il raconte ses déboires depuis ses débuts dans le domaine de la construction ainsi que l'intrusion du crime organisé dans sa propre entreprise et décoche plusieurs flèches contre la CCQ, responsable selon lui du travail au noir et de la fausse facturation.

«Dire la vérité n'est pas un concept très populaire», conclut-il. Il maintient que la CCQ n'a plus sa place dans le paysage de la construction au Québec.

Paul Sauvé n'est pas plus optimiste quant aux chances de la commission Charbonneau de «réellement changer l'industrie». «Personne ne veut faire le vrai ménage structurel. La collusion et la corruption vont reprendre de plus belle ensuite», prédit-il.

Paul Sauvé affirme qu'il est victime d'une cascade de gestes troublants depuis quelques semaines: vol de matériel, déversement de bennes de gravats sur le terrain de son entrepôt, menaces...

Il a de plus été convoqué devant la Régie du bâtiment du Québec (RBQ), hier, mais ne semblait pas très enclin à se rendre «à la FTQ», allusion au fait que la RBQ a ses bureaux dans l'édifice de la FTQ à Montréal.