Un député péquiste a été accusé de se livrer à des interprétations abjectes, mercredi, après avoir affirmé que l'entreprise de béton d'un collecteur de fonds libéral avait été favorisée dans l'octroi d'un contrat pour la réfection du pont Mercier.

Le ministre des Transports, Pierre Moreau, a réclamé des excuses à François Rebello, qui avait dénoncé plus tôt un cas de favoritisme au profit de Shockbéton, une entreprise liée à Marc Bibeau.

M. Moreau a soutenu que les travaux impliquant l'entreprise se sont déroulés sur la partie fédérale de l'ouvrage, et non sur celle qui est de juridiction provinciale.

«Manifestement, (M. Rebello) n'a pas bien fait sa recherche, ce qui est une chose et qui suggérerait des excuses, ou s'il a bien fait sa recherche, l'interprétation qu'il en fait est absolument abjecte et encore là, il doit présenter des excuses», a-t-il dit lors d'un point de presse.

Après avoir soulevé la question en Chambre, M. Rebello a déclaré mercredi qu'il était anormal qu'un consortium ait été obligé de recourir aux services de Shockbéton.

«Il pourrait y avoir une influence qui a fait en sorte qu'un ami directement du premier ministre soit favorisé dans ce contrat-là», a-t-il dit lors d'un point de presse.

M. Rebello a exhibé un contrat accordé en 2008 à Mohawk Bridge Consortium (MBC), dans lequel une clause stipule qu'il traitera avec l'entreprise de M. Bibeau.

«Le gouvernement a clairement lié les mains à un consortium pour s'assurer qu'il y ait un fournisseur qui obtienne un contrat sans soumission, a-t-il dit. C'est ça, la réalité.»

Ce contrat de 66 millions $ a été offert sans appel d'offres au consortium par la société des Ponts Jacques-Cartier et Champlain incorporée (PJCCI), qui représente dans ce cas le gouvernement fédéral et le ministère des Transports du Québec (MTQ).

Selon M. Rebello, le consortium a été contraint dans le choix de ses fournisseurs.

«Quand on fait affaire avec un consortium, on veut que ce soit le consortium après qui fasse des démarches de son côté pour choisir les meilleurs fournisseurs, donc on ne peut pas attacher un consortium, a-t-il dit. C'est une pratique qui est assez anormale.»

Dans un communiqué diffusé après la demande d'excuses de M. Moreau, M. Rebello a atténué ses attaques, soutenant qu'il est «inédit» qu'un fournisseur soit nommé spécifiquement dans un contrat.

«C'est un cas rarissime, a-t-il dit. En conséquence, les explications à l'effet que les travaux effectués par Shockbéton l'auraient été dans la portion fédérale du pont et sa demande d'excuses sont pour le moins loufoques.»

PJCCI a pour sa part soutenu que le choix de Shockbéton relevait de MBC, qui en avait fait la mention dans sa soumission initiale.

«Dans l'appel d'offres qui a été envoyé pour la sélection du contrat, il n'y avait aucun nom d'entreprise qui était souligné, a dit un porte-parole de PJCCI, Jean-Vincent Lacroix. (...) On a reçu une soumission de MBC dans laquelle il présentait son équipe et ses sous-traitants et lui nous a présenté qu'il travaillerait avec Shockbéton.»

En Chambre, M. Moreau avait répondu à M. Rebello qu'il n'y a pas de lien entre les décideurs politiques et le choix des sous-traitants ou des entrepreneurs.

Rappelant que le dirigeant de l'Unité anticollusion (UAC), Jacques Duchesneau, n'a pas pu établir que des entrepreneurs bénéficient de contrats en retour de contributions politiques, M. Moreau a affirmé que la procédure prévue par la loi et les règlements a été suivie rigoureusement concernant Shockbéton.

Lors de son point de presse, M. Rebello a ensuite rejeté l'argument de M. Moreau, expliquant que l'examen de l'UAC n'a pas porté sur l'ensemble des contrats du MTQ.

«J'établis un lien directement, a-t-il dit. Un organisateur politique, un gars responsable du financement, a une entreprise, puis il se retrouve dans une situation où il a un contrat important de plusieurs millions sans avoir eu à soumissionner? Donc, moi, je pense que c'est un problème. (...) Dans le sens où c'est du favoritisme.»