Des milliers de finissants du secondaire devront subir les conséquences d'une grève étudiante pour laquelle ils n'ont pas voté et certains pourraient en payer un lourd prix.

Entre 7000 et 8000 finissants devront en effet composer avec une session compressée à leur entrée dans les 14 collèges qui ont dû réaménager leur calendrier en raison du conflit.

Plutôt qu'une session normale s'amorçant à la fin du mois d'août pour terminer à Noël, les nouveaux arrivants ne feront leur entrée qu'à la mi-octobre et devront compléter leurs cours aux Fêtes, mais les examens seront reportés au mois de janvier.

Or, au niveau collégial, la première session est cruciale pour la réussite à venir, car les étudiants sont confrontés à une charge de travail plus lourde et un degré d'autonomie plus élevé.

«Les étudiants de première session, ceux qui vont arriver en octobre, c'est à ce moment que les taux d'abandon sont les plus élevés», soutient Micheline Thibodeau, vice-présidente de la Fédération nationale des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN), qui représente les enseignants de 13 des 14 collèges dont le calendrier a été remodelé en raison de la grève. «Ils vont parler beaucoup avec leurs profs: Est-ce que je suis dans le bon programme? Qu'est-ce que tu me conseilles, etc. Il ne faut pas échapper les nouveaux étudiants, il faut prendre le temps.»

Le président et directeur général de la Fédération des cégeps, Jean Beauchesne, partage cette appréhension.

«Au collégial, c'est au début que, pour les étudiants les plus faibles, on risque de les échapper. Nous avons une stratégie de contacter un à un les étudiants dont le parcours scolaire est plus faible pour s'assurer que cela n'arrivera pas malgré le fait qu'il y ait un décalage.»

«Souvent, il y a des étudiants qui nécessitent des sessions d'accueil et d'intégration pour les mettre à niveau. Évidemment, les étudiants les plus faibles, c'est là qu'on risque de les perdre», explique-t-il.

Micheline Thibodeau rappelle aussi qu'il y a un monde entre le secondaire et le collégial, ce qui entraîne un choc culturel. «Il faut s'y faire. Au cégep ce sont des adultes. Ils doivent se prendre en mains comme étudiants. Parfois, ça demande un peu plus d'encadrement de la part des enseignants.»

La charge de travail des enseignants sera sérieusement alourdie par ces horaires comprimés de sorte qu'il pourrait s'avérer difficile d'effectuer le suivi individuel habituellement offert aux étudiants.

Les deux fédérations sont présentement en négociations pour l'ajout de ressources humaines durant cette période, mais le simple fait d'échelonner sur environ trois mois des apprentissages habituellement livrés sur quatre mois pourrait réduire le bénéfice de l'ajout de personnel, estime Micheline Thibodeau.

«Les profs le savent que, même s'il y a des ajouts de ressources, ils vont travailler beaucoup plus le soir les fins de semaine (...) Il faut avoir le temps de voir les étudiants, pour savoir quand on doit leur lancer une bouée de sauvetage, quand leur dire de ne pas tout lâcher, de venir nous parler.»

Bien qu'il soit tout aussi conscient du fardeau que la session comprimée imposera aux étudiants et aux professeurs, Jean Beauchesne fait valoir que l'on a cherché à en minimiser l'impact.

«La session d'automne commence vers la mi-octobre, mais plusieurs collèges vont tenir leur semaine d'examens en janvier, tout comme l'épreuve uniforme du ministre (de l'Éducation) en français, qui aura lieu en janvier aussi. Nous avons décalé le plus possible après Noël des éléments qui sont moins directement liés aux cours pour faire en sorte que la compression ait moins d'effet sur l'arrivée des jeunes du secondaire.»

La session interrompue au printemps dernier, elle, sera reprise de la mi-août à la fin de septembre. Dans le cas des finissants collégiaux qui se dirigeaient vers l'université, des aménagements ont été faits dans les facultés universitaires pour pouvoir les accueillir en octobre plutôt qu'à la fin du mois d'août.