La directrice des élections du Québec l'avoue candidement : l'institution a surtout misé sur son rôle éducatif plutôt que coercitif avant 2009. Il aura fallu les déclarations fracassantes de Benoit Labonté sur le financement illicite au municipal et les « lapsus » de trois ministres libéraux sur la légalité du financement politique des entreprises pour que le DGEQ devienne davantage « pro-actif ».

« L'aspect sanction, coercitif n'était pas une priorité jusqu'en octobre 2009 », a admis Me Lucie Fiset, directrice générale des élections par intérim, devant la commission Charbonneau, où elle témoignait lundi aux côtés de Denis Lafond, le directeur de la Direction du financement des partis politiques au DGEQ.

Rappelons qu'en octobre 2009, Benoit Labonté a révélé l'existence d'un système de ristourne de 3% sur les contrats de la Ville de Montréal. Au printemps suivant, les ministres libéraux Julie Boulet, Norm MacMillan et Michele Courchesne avaient laissé entendre que les contributions politiques des entreprises étaient légales.

« Information, Formation, réflexion » : avant 2009, le DGEQ misait surtout sur la mise sur pied de comités pour penser aux irrégularités dans le financement politique. Ce fut notamment le cas dans la foulée des travaux de la commission Gomery sur le scandale des commandites en 2005.

Autre exemple : la Commission a présenté une lettre de l'ancien ministre Jean-Pierre Charbonneau, qui dès 2002, fait état du phénomène des prête-noms au sein des entreprises au prédécesseur de Me Fiset, Marcel Blanchet. Ce dernier répondra dans une correspondance subséquente qu'une « réflexion de fond » sur le sujet sera enclenchée.

« Les allégations ont commencé à être soulevées au milieu des années 1990. On a donc réfléchi durant presque 15 ans », s'est étonné le commissaire Renaud Lachance.

« On dit souvent que ça prend une crise pour qu'il y ait des réactions et la crise on l'a vécu en 2009 », a répondu Me Fiset. « Aussi, il faut voir que les allégations qui avaient lieu à l'époque n'avait pas la même ampleur et nous n'avions pas les mêmes moyens à l'époque ».

Le commissaire Lachance a répliqué en soulignant qu'un enquêteur de la commission Charbonneau avait simplement sonné aux portes des donateurs qui ont avoué d'emblée avoir servi de prête-noms. « Ç'a pris deux petites journées », a-t-il rappelé.

« Avec respect M. Lachance, lorsque vous avez une personne journaliste ou une personne autre qu'un organisme contrôleur qui se présente et qu'il demande à l'individu tout bonnement c'est facile pour l'individu de répondre, car il n'y aura pas de conséquences », a répondu Me Fiset. « Lorsqu'un enquêteur tente d'aller colliger une preuve pour amener une personne devant les tribunaux, c'est autre chose. Nous n'avons pas une collaboration très grande. Je vous dirais que nous entendons des témoins à la Commission qui très récemment, ont dit le contraire à nos enquêteurs. »

La commission Charbonneau reprend demain matin avec le témoignage de témoignage de Robert Lafrenière, le grand patron de l'Unité permanente anti-corruption.