La commission Charbonneau a continué de scruter à la loupe les liens d'amitié de l'ancien roi de la construction Tony Accurso. L'entrepreneur, qui fait une distinction claire entre ses amis et ses connaissances, a défini pour la première fois ses liens avec le défunt chef de la mafia montréalaise Vito Rizzuto et son fils Nick Junior, décrits comme des « petits contacts ».

Accurso a par ailleurs déclaré qu'il n'avait jamais rencontré le patriarche, Nick Sénior. Quant au caïd Raynald Desjardins, il dit avoir « zéro contact » avec lui.

La Commission ne lui a pas demandé d'élaborer davantage ses liens avec le crime organisé. Quelle est la différence entre un bon contact et un petit contact, lui a toutefois demandé Me Sonia Lebel, qui mène son interrogatoire. « Un petit contact, c'est quelqu'un que je peux croiser à l'occasion. That's it »

Si le défunt président de la FTQ, Louis Laberge, était comme « son père spirituel », l'ancien patron de la FTQ-Construction Jean Lavallée est comme son frère. « J'ai deux soeurs que j'adore, mais j'ai toujours voulu un frère. »

Accurso a aussi confirmé que les syndicalistes Clément Godbout, Michel Arsenault et Louis Bolduc étaient des amis, tout comme l'ancien président du comité exécutif de la Ville de Montréal Frank Zampino et l'entrepreneur Normand Trudel.

Dans la colonne des «contacts» figurent Joe Borsellino de Construction Garnier et Joe Borsellino de Petra, l'entrepreneur Lino Zambito, le journaliste Jean Lapierre, le maire de Terrebonne Jean-Marc Robitaille et le syndicaliste Ken Perreira. Bernard Trépanier, alias monsieur 3%, est pour sa part un « bon contact ».

Amitié avec Jean Lavallée : pas d'avantages dit Accurso

La procureure Lebel a insisté sur les liens entre Accurso et Jean Lavallée.

Au cours de sa carrière, Jean Lavallée a porté plusieurs chapeaux. Il a fondé la Fraternité interprovinciale des ouvriers en électricité (FIPOE) au début des années 80, syndicat qu'il a dirigé jusqu'à sa retraite en 2008. Il a aussi été président de la FTQ-Construction de 1981 à 2008, un titre qui lui assurait automatiquement un siège au conseil d'administration du Fonds de solidarité FTQ. À cela s'ajoutait le rôle de président de conseil d'administration de la SOLIM, le bras immobilier du Fonds de solidarité FTQ.

Martelé de plusieurs questions, Tony Accurso a insisté qu'il n'a jamais tiré avantage de ses liens avec Lavallée, ni au Fonds FTQ, ni à la SOLIM. Il estime qu'il n'a jamais été avantagé par rapport à d'autres entrepreneurs.

Écoutes électroniques

Le témoignage de Tony Accurso devant la commission Charbonneau a repris ce matin avec la diffusion d'écoutes électroniques entre l'ancien directeur général de la FTQ-Construction Jocelyn Dupuis et Eugène Arsenault, alors actionnaire de l'entreprise Ganotec. C'est avec un air presque amusé qu'Accurso a écouté les extraits dans lesquels les deux hommes lui reprochent d'avoir débauché les employés de Ganotec pour les faire travailler pour le compte de son entreprise Gastier.

« J'ai jamais eu un compétiteur aussi sale », dit Arsenault dans la conversation qui remonte à 2009. « Y'a eu garrochement à coup de centaines de milliers de dollars », ajoute-t-il.

« C'est crosseur en esti han. C'est toute le Fonds, là », réplique Jocelyn Dupuis.

« Cash, à part de ça », ajoute Eugène Arsenault.

Plus tard Eugène Arsenault dira qu'il «pardonne» certain de ses travailleurs. « Mets-toi à la place d'un gars qui se fait offrir un demi-million cash... La fidélité, elle passe un peu loin. »

Confronté à cet échange, Accurso a demandé à la Commission de lui citer l'heure de la conversation. La discussion a eu lieu vers 22h00. «Moi je ne connais pas Eugène Arsenault, mais c'est clair et net que lui était saoul... He's all over the place», répondra Accurso.