Avant de faire relâche durant la période électorale, la commission Charbonneau se penche, cette semaine, sur le phénomène de la fausse facturation dans le secteur de la construction.

Cette pratique coûte cher aux contribuables : Revenu Québec évalue avoir essuyé 1,5 milliard de pertes en 2008. L'an dernier, les pertes liées à la fausse facturation dans toutes les industries, incluant celle de la construction, ont quant à elles été évaluées à 3,5 milliards.

Deux témoins sont entendus aujourd'hui sur le sujet : Martin Cloutier, chef de service à l'Agence du revenu du Québec et Clément Desrochers, teneur de livres dans l'industrie de la construction, qui a été accusé de vol, fraude et gangstérisme pour son implication dans le stratagème de fausses factures de l'entrepreneur Normand Dubois.

Cours 101 sur la fausse facturation

Le premier témoin travaille en collaboration avec la Sûreté du Québec depuis 2007 sur des  enquêtes visant à démanteler des réseaux de fausse facturation. Ce matin, il est venu donner un genre de cours 101 de la fausse facturation.

Devant la commission Charbonneau, Martin Cloutier a expliqué que deux types d'entreprises émettent des fausses factures.

Dans le premier cas : des entreprises fictives enregistrées sous des prête-noms émettent des « factures de complaisances ». En réalité, ces compagnies n'offrent pas de services « réels ».

Dans le second cas, des entreprises « mixtes » qui oeuvrent réellement en construction émettent des factures légitimes pour des travaux qui ont été effectués, mais aussi des fausses factures et des factures gonflées. Cela, dans le but de s'approprier de l'argent comptant.

« L'objectif, c'est que ça ne laisse pas de traces, a expliqué Martin Cloutier. Il y a plusieurs usages de l'argent dégagé : payer les employés au noir, verser de l'argent aux administrateurs ou verser une contribution à un entrepreneur qui nous a permis de remporter le contrat. »

Martin Cloutier a par la suite présenté un stratagème dans lequel une entreprise créait une fausse entreprise de placement de personnel. Au lieu de déclarer ses employés dans la masse salariale de la véritable entreprise, les employés sont « transférés » au sein d'une « entreprise de placement ». Cette entreprise surcharge ensuite des frais administratifs pour avoir placé les employés au sein de la véritable entreprise. Ces entreprises existent seulement pour des périodes d'un an afin de passer sous le radar du fisc.

Cas de figure: Normand Dubois

Entre alors en scène, le second témoin de la commission, Clément Desrochers. Ce dernier est venu décrire comment son ex-patron, l'entrepreneur Normand Dubois, avait utilisé quatre compagnies pour mener à bien un tel stratagème.

Dans un cas, une de ces entreprises qui « louait » la main d'oeuvre percevait entre 5 et 15% de frais d'administratifs pour payer la « coquille vide ».

Cette façon de procéder permettrait aussi à l'employeur de verser moins de cotisations, à la CSST par exemple, a expliqué Desrochers.