Le bras immobilier du Fonds de solidarité FTQ s'est subitement retiré d'un projet lorsque le promoteur dit avoir refusé de verser un quart de million à un proche du crime organisé, a entendu la commission Charbonneau.

L'enquête publique a brièvement entendu hier un seul témoin, Richard Gagnon, ex-directeur de compte au Centre de financement aux entreprises de Québec des Caisses Desjardins. Il est revenu sur un projet que l'un de ses anciens patrons, Marcel Champagne, directeur de la Caisse de Loretteville, lui avait présenté en 2004 comme «un bon prospect» pour du financement.

C'est ainsi que Richard Gagnon dit avoir fait la rencontre du promoteur Laurent Gaudreau qui souhaitait obtenir un coup de pouce pour aménager une salle de spectacle temporaire à Québec, le projet Tipi. Lors de la rencontre, le promoteur est accompagné d'un certain Denis Vincent, un proche des Hells Angels.

Desjardins a accepté de financer le projet, surtout que le bras immobilier du Fonds FTQ, la SOLIM, était aussi prêt à mettre l'épaule à la roue. D'ailleurs, Richard Gagnon se rappelle que la SOLIM a fini par envoyer un chèque de 2,6 millions directement dans le compte de Tipi. Le témoin dit avoir été surpris de cette pratique, normalement de tels montants étant versés dans des comptes en fidéicommis pour éviter des problèmes si le projet échoue.

Et c'est exactement ce qui s'est produit à l'été 2008 quand la SOLIM a décidé de se retirer. Dans une conversation, Laurent Gaudreau a confié à Richard Gagnon que le financement lui avait été retiré après qu'il ait refusé de payer 250 000$. «Il avait des demandes d'un certain Denis Vincent pour avoir un montant d'argent et une participation dans son entreprise, ce que M. Gaudreaut ne voulait pas.»

La SOLIM a alors multiplié les démarches pour récupérer son financement au projet, mais Desjardins refusait de retourner l'argent estimant que le promoteur Laurent Gaudreau devait donner son autorisation. Après tout, l'argent était dans son compte.

Qu'importe, une rencontre a été organisée en octobre 2008 par Marcel Champagne avec le PDG de la SOLIM, Guy Gionet. Si Laurent Gaudreau n'a jamais été invité à cette rencontre, Denis Vincent, lui, est présent. Richard Gagnon se rappelle que Denis Vincent semblait représenter à la fois la SOLIM et Tipi. Son objectif était clair, a dit le témoin : «il prêchait pour que la SOLIM retrouve son argent». À l'issue de la rencontre, Desjardins a fini par accepter de remettre l'argent sans l'accord de Laurent Gaudreau, ce qui sera fait en décembre 2008.

Le témoignage de Richard Gagnon a été le seul entendu aujourd'hui par la Commission. L'enquête publique est à débattre en non-publication une série de requêtes déposées par l'avocat de l'homme d'affaires Louis-Pierre Lafortune. Cet ancien vice-président de Grues Guay (2005-2009) tente d'éviter de témoigner et, s'il est forcé à comparaître, à le faire à huis clos.

Le temps de trancher sur les requêtes de Lafortune, la Commission entendra demain Michel Comeau, enquêteur de la Commission. Comme ses collègues entendus récemment, celui-ci viendra témoigner pour présenter des extraits d'écoute électronique. Ces enregistrements sont tirés de la surveillance effectuée par les policiers de la Sûreté du Québec lors de l'opération Diligence.