Rosaire Sauriol, Bernard Trépanier, Frank Zampino, Gérald Tremblay... Les témoins défilent à la commission Charbonneau tels les personnages d'un téléroman. Arrogance, fausse modestie, amnésie ou étonnement perpétuel, chacun a son style, sa personnalité. Comment se prépare-t-on pour un tel exercice? Y a-t-il des écueils à éviter? Des stratégies gagnantes pour bien communiquer? Nous avons posé la question à trois experts du domaine des relations publiques pour savoir ce qu'ils conseilleraient à un témoin si on le leur demandait.

Yves Dupré Président du conseil, Octane Stratégies Communications

La stratégie

Il faut aider le témoin à bien exprimer ce qu'il veut dire et à gérer son stress. Ce n'est pas un procès, c'est une commission. La clé, c'est de bien identifier son message. Quelqu'un d'honnête qui est nommé à la Commission a tendance à paniquer et pourra même se comporter comme s'il est coupable, même s'il ne l'est pas. Souvent, le témoignage ne dure que quelques heures, quelques jours au plus. C'est un stress énorme et il faut au moins une journée de préparation pour une journée de témoignage.

La tenue vestimentaire

Les hommes (et jusqu'ici, ce sont surtout des hommes qui ont témoigné devant la Commission) doivent faire attention aux cravates agaçantes. Sinon, il faut choisir la sobriété.

Le langage corporel

Quand on aide quelqu'un à se préparer, on le filme et il se regarde ensuite. C'est toujours très pédagogique, on apprend à corriger ses tics, à se tenir droit, à regarder les gens dans les yeux.

Humour: pour ou contre?

C'est trop dangereux. Quelqu'un de très habile peut s'en sortir, mais en général, les gens qui sont là n'ont pas très envie de rire.

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Isabelle Perras Vice-présidente et directrice générale, Citoyen Optimum

La stratégie

Quand on prépare des clients en gestion de crise, on se concentre sur le plan de match à adopter pour passer le message qu'on veut passer. On va utiliser la vidéo pour se débarrasser de certains tics: les gens qui se passent la main dans les cheveux, qui jouent avec leurs lunettes, etc. Je conseillerais également à la personne de regarder quelques heures de la Commission pour comprendre son déroulement, le décorum, etc. Ça aide à diminuer la nervosité.

La tenue vestimentaire

On s'habille comme si on allait au Téléjournal: sans lignes et sans motifs, avec des couleurs fortes ou neutres. Jusqu'ici, c'est d'ailleurs ce qu'on a observé chez les témoins de la Commission.

Le langage corporel

Le non verbal parle beaucoup. On voit des gens regarder par terre, bouger les mains, bouger sur leur chaise. Il faut faire attention à cela.

Humour: pour ou contre?

Dans les situations critiques, ce n'est pas approprié. Même si on n'a rien à cacher, cela pourrait avoir l'effet contraire. Il faut aussi s'ajuster à la personne devant nous. Or, la juge Charbonneau n'a pas l'air d'apprécier l'humour.

Gary Arpin Conseiller principal, National

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La stratégie

Pierre Bourgault disait toujours: il faut être clair, simple et concis. C'est ce qui doit guider la préparation, pour une commission comme pour une conférence de presse. Ensuite, il faut tenir compte du public à qui on s'adresse, «comprendre celui qui écoute», pour reprendre les paroles d'un philosophe. Vaut mieux pratiquer et improviser le moins possible.

La tenue vestimentaire

L'image, c'est bien beau, mais tout part du message. Pour avoir couvert la commission Gomery durant six mois comme journaliste, je vous dirais que «l'habit fait le moine». Il faut éviter les distractions, les bijoux, les broches, etc.

Le langage corporel

On travaille beaucoup la synergologie dans certaines agences, mais je dirais que notre langage corporel est le reflet de notre état de préparation. La vérité remonte toujours à la surface, il n'y a pas de magie là.

Humour: pour ou contre?

C'est à manipuler avec des pincettes. Il faut que le contexte s'y prête, cela peut être périlleux. Il y en a qui sont allés trois ans à l'école pour cela et ils ne réussissent pas, alors...