L'ex-président du comité exécutif de Montréal, Frank Zampino, a multiplié les voyages avec l'entrepreneur Tony Accurso pendant le processus d'octroi des compteurs d'eau, a-t-on appris devant la commission Charbonneau. En plus d'accepter deux voyages sur le luxueux bateau de l'homme d'affaires, l'ancien numéro deux à la Ville dit avoir été avec lui et l'ex-directeur général de la Ville, Robert Abdallah, à Las Vegas, en 2006.

La commission Charbonneau est à énumérer tous les voyages effectués par Zampino en compagnie de Tony Accurso ou à ses frais. Au moins trois de ces voyages ont eu lieu alors que la Ville de Montréal était à préparer l'appel d'offres pour le controversé contrat des compteurs d'eau. Rappelons que celui-ci, plus important contrat de l'histoire de la Ville avec ses 400 millions, a été remporté par un consortium formé par les compagnies de deux amis de Zampino : l'ingénieur Rosaire Sauriol et Tony Accurso.

L'un de ces voyages à Las Vegas en février 2006 a réuni Frank Zampino, Tony Accurso et Robert Abdallah. Le trio a notamment fait un tour d'hélicoptère au-dessus du Grand Canyon aux frais de l'entrepreneur. L'ancien élu assure avoir payé sa chambre d'hôtel, au Ceasar's Palace, MGM ou Mirage. Il devra fournir les factures de ce voyage, à la demande de la Commission.

Autre révélation, l'ex-président du comité exécutif de Montréal, Frank Zampino, a séjourné sur le bateau de l'entrepreneur Tony Accurso dès 2005, a-t-il révélé ce matin devant la commission Charbonneau.

Alors qu'il se trouve en Floride, à l'hiver 2005, Frank Zampino reçoit un appel de son bon ami Tony Accurso. Celui-ci l'informe que le luxueux bateau qu'il venait de faire construire, le Touch, se trouve à quai aux Bahamas pour une semaine, sans occupant. L'ancien numéro deux de Montréal a alors décidé de prolonger ses vacances pour visiter la nouvelle acquisition de son ami.

La famille a alors acheté des billets à 99$ pour se rendre sur l'ile des Caraïbes pour séjourner une semaine. Les Zampino en ont profité pour faire une escapade de quelques jours en haute mer, a précisé le témoin. Rappelons que louer le navire coûtait 75 000$ par semaine selon Rosaire Sauriol.

Frank Zampino n'a jamais cru bon parler de ce voyage quand son autre séjour, en 2007 celui-là, a été rendu public. Il dit ne pas avoir fait le lien puisque Tony Accurso n'était pas présent en 2005 lors de son premier séjour, contrairement au second.

La Commission a par ailleurs confirmé que le prochain témoin sera l'ex-maire Gérald Tremblay. Son témoignage devrait débuter au plus tôt jeudi.

La facture du voyage de Frank Zampino sur le Touch »»

Zampino Talonné

La commission Charbonneau a durement talonné l'ex-président du comité exécutif de Montréal, Frank Zampino, sur une importante contradiction dans son témoignage, ce matin. Après avoir catégoriquement nié depuis le début de son interrogatoire avoir été averti d'une possible collusion dans la métropole, le témoin a pourtant affirmé ce matin avoir fermement agi en 2006 quand il a été prévenu du problème.

Ce matin, Frank Zampino a confirmé avoir pris connaissance d'une lettre en novembre 2006 sur le manque de joueurs dans le marché montréalais de la construction. Disant avoir pris la situation au sérieux, il affirme avoir demandé la mise en place de mesures pour augmenter la concurrence sur le marché montréalais. L'ancien numéro deux à la Ville a toutefois admis ne jamais en avoir parlé à l'ex-maire Gérald Tremblay. «Le maire était au courant... Mais je ne me rappelle pas avoir parlé de ce dossier avec le maire.» 

Ces explications ont fait sursauter le commissaire Renaud Lachance. Celui-ci a rappelé que le témoin a été catégorique hier en disant ne jamais avoir été informé d'une possible collusion entre entrepreneurs. «Il n'y a jamais eu de discussion, au comité exécutif, concernant cette possibilité qu'il y ait un système de collusion ou de partage de contrats des entrepreneurs en construction, durant tout le temps que j'ai été là, entre 2002 et 2008.» 

Le commissaire Lachance a demandé comment Frank Zampino pouvait avoir oublié avoir eu vent de la collusion s'il avait été si proactif pour contrer le problème? Cette remarque a irrité le témoin qui s'est emporté. «Je m'objecte à ce qu'on essaie d'insinuer que je n'ai pas pris part à ce qu'il y ait des recommandations de suivi.»

Amitiés secrètes

L'ancien président du comité exécutif de Montréal, Frank Zampino, a par ailleurs admis avoir noué des liens d'amitié avec d'importants entrepreneurs obtenant de nombreux contrats dans la métropole sans jamais en parler à l'ex-maire Gérald Tremblay. L'ex-élu, qui admet leur avoir prodigué des conseils dans leurs affaires avec la Ville, assure que ces amitiés n'ont jamais influencé son jugement.

Du temps où il était le numéro deux à la Ville de Montréal, Frank Zampino dit avoir rencontré beaucoup de personnes qui auraient voulu devenir son ami. «Mais si je sentais que le but était d'en abuser, ce n'était pas un vrai ami», a-t-il exposé.

Or deux importants entrepreneurs décrochant de nombreux contrats à la Ville de Montréal ont réussi à le convaincre de la légitimité de leurs sentiments à son égard: Rosaire Sauriol et Tony Accurso.

Frank Zampino dit avoir aimé la «tête politique» de Rosaire Sauriol, avec qui il ne cache pas avoir parlé «des enjeux de la Ville». Il a même dit lui avoir prodigué des conseils dans ses affaires avec certains arrondissements. Pour Accurso, leur amitié a pris naissance il y a une trentaine d'années par l'entremise de leurs pères qui se connaissaient.

L'ex-président du comité exécutif assure qu'ils parlaient rarement politiques. «On parle de beaucoup de choses, mais pas dans le but d'aboutir à un dossier», a-t-il assuré.

Malgré ces fortes amitiés, Zampino ne voit aucun conflit d'intérêts possible et assure avoir toujours maintenu son esprit critique quand venait le temps de gérer les affaires de la Ville. «Même si j'ai tissé des liens, j'ai toujours été capable de faire la distinction entre mes amitiés et mes responsabilités», a martelé Frank Zampino à une demi-douzaine de reprises.

Pressé de questions par la procureure Sonia Lebel, Frank Zampino a toutefois admis ne jamais avoir informé l'ex-maire Gérald Tremblay de ses amitiés avec Rosaire Sauriol et Tony Accurso. «Non, je n'avais pas à exposer au maire mes amis, comme je ne lui demandais pas les siens», a répondu le témoin.

Seul dérapage qu'il attribue à son amitié, il reconnaît qu'il a commis une «erreur, une maladresse» en se rendant sur le luxueux bateau de Tony Accurso, dans les Îles caïmans. Surtout que ce voyage est survenu alors que ses deux meilleurs amis entrepreneurs avaient formé un consortium pour décrocher le plus important contrat de l'histoire de la Ville de Montréal, celui des compteurs d'eau, évalué à 400 millions.

Questionné sur ses amitiés, Frank Zampino a révélé être toujours ami avec Rosaire Sauriol et Tony Accurso. «Vous gardez comme ami quelqu'un qui a triché pendant 7 ans, qui a volé les Montréalais. Mais si on ne vous croit pas, on y voit une certaine logique de rester leur ami», a lancé le commissaire Renaud Lachance.

Au mieux, Zampino a dit avoir été «déçu» et «trahi» par ce que Rosaire Sauriol a dit devant la Commission. Cette remarque a fait bondir le commissaire Lachance qui lui a souligné qu'il avait été élu pour défendre les Montréalais et donc qu'il devrait être davantage déçu de ce qu'il a fait, soit voler les contribuables pendant au moins 7 ans.