Les relations qu'entretient la firme d'ingénieurs Dessau avec les principes d'éthique professionnelle ont été remises en question, jeudi, lors du témoignage du vice-président principal de la firme, Rosaire Sauriol, devant la commission Charbonneau.

La première salve est venue de l'avocat de l'Association des constructeurs de routes et de grands travaux du Québec, Me Denis Houle. L'avocat a questionné M. Sauriol sur les motifs qui ont incité sa firme à faire une déclaration volontaire, à Revenu Québec, dans laquelle Dessau a reconnu avoir produit de fausses factures pour une somme de 2 millions.

Ces fausses factures servaient à générer des sommes énormes en argent comptant dont la société avait besoin pour financer illégalement des partis politiques municipaux, à Montréal et en banlieue, et rembourser ses cadres qui signaient des chèques au bénéfice du Parti libéral du Québec et du Parti québécois. Dessau a payé une amende de 2 millions au fisc à la suite de cette confession. M. Sauriol a affirmé que cette déclaration avait permis à Dessau de «tourner la page sur une époque malheureuse».

Me Houle a alors souligné que, depuis cette déclaration, Dessau avait obtenu des contrats du ministère des Transports du Québec et de la Ville de Montréal atteignant un peu plus de 146 millions. «Si vous n'aviez pas fait cette déclaration volontaire, a-t-il noté, vous n'auriez peut-être pas eu l'occasion d'obtenir ces contrats», en raison des lois anticorruption adoptées par l'Assemblée nationale depuis 2009.

«En divulguant, c'était une véritable opération de marketing que vous faisiez pour votre compagnie», a souligné la présidente de la Commission, France Charbonneau.

«Notre démarche était plus profonde que ça», a protesté M. Sauriol.



Agir «dans l'intérêt de l'organisation»


L'avocat de l'Association de la construction du Québec, Me Denis Rochefort, a ensuite souligné des ambiguïtés dans le code d'éthique adopté par Dessau, en 2010, dans la foulée de sa déclaration au fisc. Il a fait dire à M. Sauriol que le respect du code de déontologie de l'Ordre des ingénieurs a priorité sur toute autre considération. Il a ensuite lu un passage du code d'éthique de la firme qui dit qu'il «est très important que chaque membre du conseil d'administration, cadre, professionnel, employé et consultant oeuvrant chez Dessau prenne des décisions et agisse, avant tout, dans l'intérêt de l'organisation».

Visiblement agacé, M. Sauriol a répondu à Me Rochefort: «Si vous avez des recommandations à faire sur notre code d'éthique, vous êtes le bienvenu.»

«La première recommandation, a alors rétorqué la juge Charbonneau, serait peut-être de le suivre.»