L'ex-président du comité exécutif, Frank Zampino, a favorisé une entreprise dans la vente d'un important terrain dans l'est de Montréal, selon l'ex-directeur des stratégies et transactions immobilières de Montréal, Joseph Farinacci. L'homme entendu aujourd'hui par la commission Charbonneau affirme avoir démissionné de son poste après avoir été «contourné».

La commission Charbonneau a repris ses audiences aujourd'hui avec le témoignage de Joseph Farinacci, qui a fait pratiquement toute sa carrière dans la gestion immobilière. Il a dirigé le service responsable de vendre les propriétés municipales de 2005 à 2007.

C'est durant cette période, affirme-t-il, que l'ex-président du comité exécutif Frank Zampino a favorisé une entreprise dans la vente d'un terrain de 2 millions de pieds carrés à Rivière-des-Prairies, dans l'est de Montréal.

Parmi les trois soumissions reçues à la suite de l'appel d'offres, un comité de sélection avait retenu la proposition de l'entreprise Iberville, qui offrait 1,5 million pour construire un projet très dense.

Ce choix a déplu à Frank Zampino, qui a expliqué à Farinacci que le consortium Petra St-Luc aurait dû gagner. «Lors d'un appel d'offres antérieur, quand la SDM [Société de développement de Montréal] a vendu l'immeuble de The Gazette, sur Saint-Antoine, c'était supposé être Petra qui gagne, mais ça n'a pas marché. Donc, maintenant, c'était au tour de Petra de gagner. Lorsqu'il m'a dit ça, je suis resté surpris», a raconté Farinacci.

Un avis juridique a été demandé, et la proposition d'Iberville a finalement été rejetée parce que, selon les critères de l'appel d'offres, son projet était jugé trop dense selon les critères de l'appel d'offres. Un nouveau comité de sélection a été mis sur pied, et celui-ci a choisi le consortium Petra St-Luc.

Mécontent du déroulement du dossier, Farinacci a demandé que l'offre de Petra, à 1 million, soit majorée de 500 000$ pour compenser les pertes entraînées par le rejet de l'offre d'Iberville. Zampino a semblé surpris, mais il y a consenti.

C'est Farinacci lui-même qui est allé chez Petra chercher le dépôt associé à ces 500 000$ de plus exigés pour la vente du terrain. Le responsable, Giuseppe Borsellino, lui aurait alors dit: «Tu me coûtes cher!»

Plus tard aujourd'hui, Farinacci parlera du Faubourg Contrecoeur. Cette partie de son témoignage sera toutefois frappée d'un interdit de publication pour éviter de nuire au procès des accusés dans cette affaire.

Farinacci a fini par passer au secteur privé, dégoûté de voir que les règles qu'il tentait de mettre en place pour protéger les intérêts de la Ville étaient sans cesse contournées. «Je devais me battre pour que certaines transactions soient à la hauteur des pratiques établies», a dénoncé Farinacci.

Malgré l'interdit de publication qui entre en vigueur cet après-midi, on en sait déjà un peu sur le rôle qu'a joué M. Farinacci dans le Faubourg Contrecoeur. La policière Isabelle Toupin a expliqué le 22 janvier dernier que Joseph Farinacci s'était opposé à cette transaction parce qu'il estimait que les études étaient incomplètes.

Par la suite, le service de Farinacci s'est fait retirer le dossier, qui a plutôt été confié à la SHDM. «Au départ, la transaction devait se faire par M. Farinacci. [...] Dans le fond, il veillait aux intérêts de la Ville et, lors de la transaction, on lui a carrément dit de ne pas procéder à la transaction, étant donné que c'était Martial Fillion qui allait faire la transaction», a raconté Mme Toupin.

Joe Borsellino témoigne

Après Farinacci, le témoin entendu par la Commission a été Giuseppe (dit Joe) Borsellino, propriétaire de Garnier Construction. L'entreprise a été nommée à 230 reprises depuis le début de la Commission.

Joe Borsellino fait partie des sept entrepreneurs en construction du Québec dont l'empire a des ramifications tentaculaires, selon le témoignage qu'a rendu en juin Jacques Duchesneau, ex-dirigeant de l'Unité anticollusion.

L'ex-entrepreneur Lino Zambito a affirmé que Garnier était l'une des entreprises qui participaient au système de collusion à la Ville de Montréal. L'ex-fonctionnaire Gilles Surprenant a quant à lui affirmé que Borsellino lui avait versé des pots-de-vin.