Deux ministres fédéraux ont pris leurs distances par rapport à Robert Abdallah, dont le nom vient de ressortir à la Commission Charbonneau, en niant qu'il ait autrefois été le candidat de prédilection du gouvernement pour être à la tête du Port de Montréal.

Les ministres Maxime Bernier et Christian Paradis ont ainsi tous deux nié, mercredi, que le gouvernement ait appuyé ou tenté de favoriser une candidature quelconque pour le poste de président de cette agence fédérale.

Pourtant, M. Abdallah, un ancien directeur général de la Ville de Montréal, avait été mêlé à une controverse lorsque le gouvernement fédéral avait signifié en 2007 au conseil d'administration du Port qu'il était le candidat préféré d'Ottawa.

Le président du conseil d'administration avait déclaré qu'il avait rencontré Dimitri Soudas, l'ancien directeur des communications de Stephen Harper, dans un restaurant de Montréal en 2007. M. Soudas aurait alors fait valoir la candidature de M. Abdallah.

L'ancien ministre conservateur Michael Fortier avait dit au quotidien Globe and Mail qu'il avait ensuite dû rappeler au conseil d'administration son indépendance.

M. Soudas n'avait d'ailleurs pas nié que les conservateurs souhaitaient voir M. Abdallah au Port de Montréal. Il avait déclaré à un comité parlementaire en 2008 que «trois paliers de gouvernement» avaient indiqué une préférence pour le poste à l'agence portuaire.

«Le gouvernement avait exprimé un certain support pour M. Abdallah mais au bout du compte, le conseil a pris une décision différente», avait déclaré M. Soudas à La Presse Canadienne en 2009.

«Le gouvernement a indiqué une préférence», avait-il ajouté.

Alors que le nom de M. Abdallah a refait surface dans l'actualité cette semaine, le gouvernement a réitéré qu'il n'a pas le pouvoir de nommer qui que ce soit puisqu'il s'agit de la prérogative du conseil d'administration du Port.

De plus, M. Abdallah n'a finalement pas été choisi pour ce poste, souligne-t-on dans les rangs conservateurs depuis que son nom a été prononcé lors des audiences publiques sur la corruption et la collusion dans l'industrie de la construction au Québec.

«Il n'y a personne qui a poussé quoi que ce soit. À ce que je sache, M. Abdallah n'a pas été nommé», a lancé le ministre Paradis mercredi à la sortie du caucus conservateur, semblant irrité par la question.

«Notre gouvernement n'a pas appuyé une candidature. C'est le Port qui n'a pas nommé cette personne-là», a pour sa part déclaré M. Bernier.

«Moi je suis bien heureux que cet homme-là n'ait pas été nommé à aucune position», a même ajouté le ministre.

En milieu de soirée mercredi, le bureau du premier ministre a tenu à clarifier ce que MM. Bernier et Paradis ont déclaré. L'attaché de presse Carl Vallée a rappelé que M. Abdallah était le candidat privilégié par les autorités municipales montréalaises.

«Pour être clair, le gouvernement a exprimé sa préférence pour le candidat de la ville de Montréal. Le conseil a pris sa décision et M. Abdallah n'a pas été nommé», a écrit M. Vallée dans un courriel.

Lors de la période de questions, l'opposition néo-démocrate n'a pas manqué, comme la veille, de mettre sous le nez du gouvernement son lien présumé avec M. Abdallah, qui se trouve maintenant mêlé à des allégations de corruption.

Ces allégations n'ont toutefois pas été prouvées devant un tribunal et M. Abdallah les nie catégoriquement.

«Je sais que c'est le conseil d'administration du Port de Montréal qui nomme le président, mais cela n'a pas empêché certains des conseillers du premier ministre de passer des coups de fil et de tordre des bras pour nommer l'homme de main des conservateurs. Et quel était cet homme, ce candidat idéal? C'était Robert Abdallah», a lancé le député du Nouveau Parti démocratique (NPD) Alexandre Boulerice.

«Pourquoi?», a-t-il demandé à deux reprises à la Chambre des Communes.

Le secrétaire parlementaire chargé de ce dossier, Pierre Poilievre, a évité de répondre aux questions, détournant le sujet au point de demander à M. Boulerice s'il aimait le Canada.

C'est l'ex-entrepreneur Lino Zambito - dont les déclarations défraient les manchettes depuis quelques jours - qui a parlé de Robert Abdallah.

Il a allégué à la Commission Charbonneau qu'il devait se procurer des tuyaux d'égout - pour un prix plus élevé - auprès d'une compagnie qui avait une entente avec M. Abdallah, alors directeur général de la Ville de Montréal. On lui aurait fait valoir qu'il serait dédommagé pour le prix plus élevé, a-t-il aussi affirmé.