L'avocate du Parti québécois à la commission Charbonneau, Me Estelle Tremblay, estime que Jacques Duchesneau s'est discrédité en poursuivant son enquête après avoir été congédié de l'Unité anticollusion.

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Pendant une heure, l'avocate a tranquillement questionné l'ancien policier sur son embauche et les limites de son mandat. Puis en début d'après-midi, elle a sonné la charge. «Je suis d'opinion que le rapport bénévole de M. Duchesneau affecte notablement sa crédibilité comme dirigeant d'un organisme public. M. Duchesneau, sans aucune autorisation, s'est improvisé enquêteur, a constitué des dossiers sur autrui et ce faisant, a compromis impartialité de sa fonction de représentant de l'État lorsqu'il était dirigeant de l'UAC» Me Tremblay demande à avoir accès au rapport que Jacques Duchesneau a intitulé «Le financement illégal des partis politiques, un système hypocrite où l'influence est à louer et les décisions sont à vendre». Elle souhaite le contre-interroger sur ce document.

Le «rapport bénévole», comme il est surnommé à la Commission Charbonneau, par opposition au rapport de septembre 2011, a été remis lundi aux enquêteurs. Il n'a toutefois pas été déposé en preuve pour les travaux de la Commission. «C'était probablement une très bonne décision parce qu'une personne peut pas s'improviser enquêteur dans notre société à moins avoir les pouvoirs pour le faire, nous ne sommes pas dans un état policier», a largué Me Tremblay.

L'avocat du PQ a rappelé que le Code civil interdit à quiconque d'enquêter sur une personne sans son consentement, à moins d'en avoir le pouvoir.

«Les travaux de la Commission visent à faire lumière sur certaines activités et on ne peut pas permettre à M. Duchesneau d'enlever son chapeau de dirigeant de l'UAC et de faire des enquêtes sur ses voisins étant donné qu'une fois dans sa vie, pendant 18 mois, il a dirigé l'Unité.»

La juge Charbonneau a suspendu pendant une heure les audiences pour permettre à l'avocate de lui présenter de la jurisprudence à ce sujet afin qu'elle tranche.

Après avoir passé les quatre premiers jours de son témoignage sur l'offensive, à larguer ses révélations-chocs, l'ex-directeur de l'Unité anticollusion, Jacques Duchesneau, a été placé sur la défensive ce matin. Les avocats des constructeurs de routes et du gouvernement ont talonné l'ancien policier et ses collègues sur les «imprécisions» qu'ils disent avoir relevées.

«Mon rapport, on m'a demandé de prendre une photo et là on en train d'en faire un rayon X», a répondu un Jacques Duchesneau excédé de certaines questions. L'avocat de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, Me Denis Houle, cherchait à comprendre la signification de mots utilisés dans son rapport.

Pour l'heure, c'est toutefois Me Benoît Boucher, qui représente le gouvernement, qui s'est montré le plus incisif, dans son bref passage. En à peine deux questions, il a tenté de mettre à mal la crédibilité de l'enquêteur Martin Morin, qui a épaulé Jacques Duchesneau pendant les 18 mois de l'UAC.

Me Benoît Boucher a durement questionné l'enquêteur sur un tableau utilisé dans le rapport de l'UAC pour illustrer le fait que des entreprises auraient eu accès à l'estimation du ministère des Transports avant de déposer leurs soumissions. «Est-ce que vous avez vérifié si ce dossier concerne une municipalité ou le MTQ ?»

Après quelques hésitations, M. Morin a fini par admettre avoir «présumé que l'information provenait du MTQ».

«Vous avez présumé ?» a aussitôt souligné Me Boucher, en insistant sur le mot «présumé». «Combien d'autres présomptions vous avez fait dans votre rapport ?»

Le ton était donné pour sa deuxième question, l'Avocat du gouvernement enchaînant sur l'indemnité de 1,1 million versée à Simard-Beaudry, firme de Tony Accurso, pour l'annulation d'un de ses contrats. «Est-ce que vous avez vérifié ce que constituait cette indemnité ?»

L'enquêteur a tenté d'expliquer qu'il n'avait pas mené personnellement cette enquête, avoir basé son témoignage sur le résumé d'enquête d'un collègue, mais il a dû admettre ne pas avoir fait cette vérification non plus.

«Vous avez présumé je suppose ?» a lancé Me Boucher.

Plus tôt en matinée, l'enquêteur Morin a également dû admettre avoir fait une erreur en affirmant hier que Michel Marchand avait travaillé pour l'entreprise EBC. Il était plutôt à l'emploi de Neilson.