Ce n'est peut être pas le début de l'amitié, mais c'est la fin de la guerre. Marc Bellemare et Jean Charest ont convenu d'abandonner leurs poursuites réciproques.

Mercredi dernier, l'ex-ministre de la Justice proposait la paix légale au premier ministre Charest. Selon l'entente, chacun abandonnait sa poursuite en diffamation. M. Bellemare s'engageait en outre à retirer sa requête en nullité contre la commission Bastarache et le gouvernement.

Son offre a été acceptée. «Je considère que les Québécois ont assez payé et je pense que le premier ministre du Québec devrait dorénavant accorder tout son temps et toute son énergie à la conduite des affaires», a expliqué Marc Bellemare par voie de communiqué en fin d'après-midi.

La commission Bastarache a coûté environ 5 millions $. Au lendemain de l'exercice, la majorité des Québécois sondés continuaient de croire la version de Marc Bellemare, même si le commissaire ne la jugeait pas fondée.

M. Charest souhaitait passer à autre chose, racontait lundi une source proche de lui. Au dépôt du rapport Bastarache, le premier ministre s'était déjà plaint d'avoir vécu «une des années les plus difficiles de (sa) vie.» Il estime que le rapport Bastarache et le Directeur général des élections ont déjà confirmé sa version des faits, et souhaite mettre l'épisode derrière lui.

Les hostilités avaient commencé au printemps dernier. M. Bellemare disait avoir subi l'influence indue du collecteur de fonds du PLQ pour nommer des juges. M. Charest répliquait en déclenchant la commission Bastarache et en poursuivant son ancien ministre pour 700 000$ en dommages et intérêts. Il assurait qu'il assumerait lui-même ses frais juridiques et donnerait l'argent possiblement gagné à des oeuvres de charité.

Marc Bellemare répliquait en septembre avec une contre-poursuite de 900 000$. Il dardait même le premier ministre en essayant d'invalider sa poursuite sur une technicalité. Elle était inscrite au nom de Jean Charest. Or, se plaisait à rappeler l'avocat de M. Bellemare, M. Charest est inscrit au Barreau sous son prénom de baptême, John James. M. Bellemare avait aussi intenté une requête en nullité contre la commission Bastarache.

Mais même s'il abandonne maintenant ses poursuites, M. Bellemare ne change pas d'opinion. Ni de ton. «Les Québécois ont été à même de tirer leurs conclusions sur la commission Bastarache. Après avoir suivi ce cirque pitoyable en direct à la télévision, ils ont désavoué le commissaire, ses procédés et ses convictions», raille-t-il.

Il dit ne rien regretter. «J'ai dit la vérité et c'est l'intérêt public que j'ai choisi de servir. Et je continuerai d'exprimer mes opinions sur la conduite des affaires de l'État comme c'est le droit fondamental de tout citoyen dans une démocratie.»