Michel Bastarache a écrit un rapport partial et complaisant envers Jean Charest, accuse Marc Bellemare, qui rejette ses conclusions.  

Marc Bellemare estime notamment que ses avocats ont été «victimes d'obstruction systématique». Me Bastarache a refusé d'entendre certains de leurs témoins et a limité à 30 minutes le contre-interrogatoire de Franco Fava, un collecteur de fonds du PLQ, a-t-il plaidé.

Dans son rapport, le commissaire conclut que l'ancien ministre «n'a pas été contraint» de nommer des juges, qu'il a plutôt «agi de façon volontaire et indépendante». Cette conclusion est «fausse», a tonné Me Bellemare: «Je ne sais pas pour qui il se prend pour dire qu'il n'y a pas eu de pression. C'est moi qui l'ai vécue, la pression.» Il assure qu'il a «dit la vérité à 100%» et que, en revanche, des témoins se sont parjurés. «La population du Québec qui a écouté ça, journalistes, professeurs, cols bleus, eux ont cru ce que j'ai dit. C'est bizarre!» a-t-il laissé tomber. «M. Bastarache était à une commission d'enquête politique, il est nommé par le premier ministre... C'était prévisible, je me disais qu'il ne pourrait pas arriver à une conclusion qui soit défavorable au premier ministre.»

Me Bellemare trouve «ridicule» que le commissaire réfute ses allégations tout en reconnaissant que le processus de nomination des juges est «perméable aux interventions et influences de toutes sortes». «M. Bastarache ne cite aucun cas où cela se serait produit, alors pourquoi proposer un tel chambardement dans le processus de nomination? Or, c'est bien évident que ça s'est produit. Ça s'est produit dans mon cas. M. Bastarache s'est inspiré bien sûr de ça. Mais il ne le dit pas, parce qu'il fait un rapport complaisant pour le premier ministre qui l'a nommé.»

Il juge aussi «un peu étrange» que le commissaire ait refusé de trancher sur les rencontres du 2 septembre et du 8 janvier 2004. «Ce sont les deux rencontres où j'ai informé M. Charest de la situation. À quoi bon faire une commission s'il ne peut trancher? Il ne peut nous reprocher de ne pas avoir fait la preuve s'il enlève des éléments aussi cruciaux.»

Selon lui, Jean Charest a «tripoté» la liste des candidats aptes à être nommés juges et a ainsi «violé» le règlement encadrant le processus de nomination. «Pourquoi M. Bastarache ne l'a-t-il pas blâmé?» s'est-il demandé. Dans son rapport, Me Bastarache laisse à l'Assemblée nationale le soin de décider s'il incombe au ministre de la Justice seul de choisir les juges ou si celui-ci peut consulter le premier ministre, comme c'est le cas depuis 2003. Les deux options sont valables, dit-il.

Me Bellemare reproche également au commissaire de ne pas avoir blâmé M. Charest pour le favoritisme «institutionnalisé» à son cabinet. «Je suis extrêmement perplexe parce qu'il ne condamne pas les interventions systématiques de collecteurs de fonds comme Charles Rondeau, avec Chantal Landry, pendant six mois, au cabinet du premier ministre, où il a influencé des centaines de décisions de nominations, y compris de nomination de juges.»

«Manoeuvre de diversion»

Pauline Marois estime quant à elle que la commission Bastarache a été «conçue par M. Charest, pour M. Charest» et que, par conséquent, elle «met de l'avant la vérité de M. Charest». Toute cette opération était «une manoeuvre de diversion» qui visait à réduire la pression pour qu'il ouvre une enquête publique sur l'industrie de la construction, croit la chef péquiste.

Elle croit que les Québécois ont vu une autre commission que ce qu'en retient le rapport. «Les Québécois ont vu défiler des collecteurs de fonds du Parti libéral qui étaient régulièrement au bureau du premier ministre pour influencer des nominations. Si Charles Rondeau passe une journée entière au bureau du premier ministre à regarder les curriculums avec Chantal Landry, ne peut-on pas dire qu'il y a eu influence?» a-t-elle lancé.