L’obligation pour les voyageurs revenant de Chine de présenter un test de dépistage négatif à la COVID-19 n’empêchera pas les nouveaux variants de se propager, a souligné un expert.

Kerry Bowman, un professeur adjoint à la faculté de médecine Temerty de l’Université de Toronto, a qualifié cette exigence de « décision absolument politique et non fondée sur la science à ce stade ».

« Ce ne sont pas les premiers jours de la pandémie, a-t-il déclaré. Je pense donc que c’est en grande partie politique ».

Le gouvernement fédéral a annoncé samedi que les voyageurs en provenance de la République populaire de Chine, de Hong Kong ou de Macao devraient présenter un résultat négatif à un test de dépistage de la COVID-19 à compter du 5 janvier.

Tous passagers âgés de 2 ans et plus revenant de ces trois endroits sont touchés par cette mesure temporaire.

Le levée par la Chine de sa politique « zéro COVID » a engendré un bond important des cas à travers ce pays, bien que l’on ne sache pas grand-chose sur les différents variants d’Omicron actuellement en circulation, a expliqué le Dr Bowman, qui enseigne la bioéthique.

« Je ne pense pas que ce soit une bonne idée, et je ne pense pas que cela nous rende plus en sécurité. À première vue, il semble que les gouvernements soient proactifs et sensibles et qu’ils protègent leurs citoyens, a-t-il précisé. Mais il est assez clair que le dépistage au point d’entrée n’est pas du tout efficace. Souvent, les gens peuvent être déclarés positifs des jours et des semaines plus tard ».

Le Dr Isaac Bogoch, professeur agrégé à la Faculté de médecine Temerty de l’Université de Toronto, a affirmé que les objectifs liés à cette exigence restaient flous, et que de telles mesures n’avaient pas aidé.

« Nous savons par le passé que des mesures de voyage très ciblées comme celle-ci ne font pas grand-chose pour empêcher la propagation de la COVID, que ce soit par son arrivée au Canada ou par la menace de variants se développant sur le territoire », a-t-il précisé.

Le Dr Bogoch a ajouté que si la Chine avait été transparente avec ses données, ses variants, ses vaccins et sa propagation de la COVID-19, cela aurait aidé la situation.

« Ne prétendons tout de même pas que le fait d’obliger les voyageurs en provenance de Chine à subir un test PCR négatif avant de venir au Canada aura un impact sur la situation virologique canadienne », a-t-il soutenu.

Selon lui, la recherche a montré que le virus se propageait par la mobilité humaine, et que le prochain variant pourrait même émerger ailleurs qu’en Chine. Même si c’était le cas, celui-ci pourrait atterrir au Canada par d’autres voies indirectes.

Tester les eaux usées

Une mesure plus efficace, a indiqué le Dr Bowman, serait de tester les eaux usées des avions et des aéroports pour vérifier la charge virale et les mutations. L’aéroport international de Vancouver a d’ailleurs annoncé samedi qu’il élargirait son programme pilote d’analyse des eaux usées.

L’un des variants, XBB. 1.5, qui suscite des inquiétudes par sa propagation rapide, est déjà en Amérique du Nord, a déclaré le professeur.

« Dans les années à venir, lorsque cette histoire sera racontée, lorsque nous aurons une certaine objectivité […] à l’échelle mondiale, nous allons voir que nous avons fait beaucoup de choses qui étaient davantage politiques que fondées sur des preuves », a-t-il ajouté.

Le Pr Bogoch a déclaré que le virus qui cause la COVID-19 continuait de muter, mais que la plupart des gens au Canada avaient une certaine forme d’immunité grâce à une combinaison de vaccins et d’infections antérieures.

Il a ajouté qu’une augmentation de séquençage des données aiderait à identifier et à comprendre les variants émergents partout à travers le monde. Selon lui, les gens, en particulier les personnes âgées et celles qui ont d’autres problèmes de santé, devraient obtenir une dose de rappel pour rester en sécurité. Le port d’un masque à l’intérieur peut également réduire la probabilité d’infection.

« Si nous regardons à court terme, nous verrons augmenter et diminuer les cas de la COVID-19 dans la communauté, tout comme nous l’avons vu au cours des deux dernières années », a conclu le Pr Bogoch, ajoutant qu’il espérait que les futures vagues de COVID-19 auraient de moins en moins d’impact au fil du temps.