Après une certaine accalmie en 2021, le Québec a enregistré une hausse marquée des décès attribués à la COVID-19 cette année. Le variant Omicron jumelé à la levée des mesures sanitaires peut expliquer ce sombre bilan, selon deux experts.

L’année 2022 se termine par un lourd bilan en ce qui a trait aux décès liés à la COVID-19 dans la province. Selon les données de l’Institut national de santé publique, 5688 décès ont été attribués à la maladie cette année. C’est nettement plus que les 3296 morts comptabilisées l’année précédente. Le bilan reste néanmoins inférieur aux 8502 décès observés lors de la première année de la pandémie.

« Le variant Omicron était moins dangereux que le Delta, qui précédait, mais il était tellement transmissible qu’il a causé un nombre impressionnant de cas d’infection qui se sont traduits par une proportion de décès plus élevée », explique le virologue Benoit Barbeau, professeur au département des sciences biologiques de l’Université du Québec à Montréal.

Omicron a ainsi fait exploser le nombre de cas dépistés en 2022 : pas moins de 633 802 ont été confirmés, malgré les limites imposées au dépistage. C’est trois fois plus que lors de la première année de la pandémie.

La vaccination a évidemment contribué à freiner la maladie, « mais s’il y a une grande proportion de personnes infectées, il va y avoir quand même une proportion qui va décéder », précise M. Barbeau.

La vaste majorité des décès dus à la COVID-19 s’est concentrée chez les personnes âgées de 70 ans et plus. Ce groupe est demeuré le plus vulnérable depuis le début de la pandémie, représentant 87 % des morts encore cette année.

Mesures sanitaires et doses de rappel

La levée des mesures sanitaires dans la première moitié de l’année peut aussi contribuer à expliquer ces chiffres, estime la biochimiste Nathalie Grandvaux, de l’Université de Montréal, qui dirige des recherches sur les infections respiratoires au Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM). « Les gens qui étaient protégés par les mesures sanitaires, en plus de la vaccination, ne le sont plus », résume-t-elle.

Malgré la vaccination et la virulence moindre des nouveaux variants, « les personnes plus vulnérables sont toujours plus à risque d’avoir des symptômes graves, d’être hospitalisées et de décéder », ajoute M. Barbeau.

Qui plus est, la popularité des doses de rappel a décru avec le temps, rappelle Nathalie Grandvaux. Sans compter que « certains variants, plus récents, sont capables d’échapper à la réponse immunitaire donnée par le vaccin chez les personnes vulnérables et immunosupprimées », détaille-t-elle.

Sept enfants morts en raison de la maladie

Le Québec a déploré en 2022 sept décès attribués à la COVID-19 chez des enfants de moins de 10 ans. Un seul décès d’enfant avait été rapporté durant les deux premières années de la pandémie.

Pour Mme Grandvaux, le Québec pourrait adopter des moyens pour mieux prévenir la maladie, sans retourner à des mesures sanitaires restrictives. Par exemple en améliorant son bilan en termes de ventilation et d’assainissement de l’air des bâtiments. Ou encore en informant mieux la population quant à la nécessité du port du masque dans certaines occasions.

« On sait que la COVID est avec nous depuis trois ans et qu’elle ne va pas disparaître. Et que l’impact des autres virus respiratoires est plus important qu’avant », souligne-t-elle.

C’est beaucoup de morts cette année, pour des virus respiratoires. C’est vraiment énorme. Est-ce que comme société on devrait accepter ça ? Moi, je dirais que non. Parce qu’on a des moyens de se protéger, sans brimer notre liberté.

Nathalie Grandvaux, biochimiste à l’Université de Montréal, qui dirige des recherches sur les infections respiratoires au CHUM

La surmortalité toujours présente en 2022

La hausse des décès liés à la COVID-19 s’est aussi reflétée dans la surmortalité. En date de la mi-octobre, le Québec déplorait 5,7 % de décès de plus qu’anticipé. Encore une fois, c’est moins que la surmortalité de 7,7 % observée en 2020, mais nettement plus qu’en 2021.

À noter que le variant Omicron se fait encore lourdement sentir. C’est d’ailleurs l’un de ses sous-variants, le BQ.1, qui circule le plus actuellement, représentant la majorité des nouveaux cas.

La vague Omicron s’est aussi fait sentir dans les hôpitaux. Le Québec a rapporté tout près de 50 000 hospitalisations liées à la COVID-19 cette année, soit nettement plus que les 15 000 comptabilisées l’année précédente. Le bilan reste plus lourd même en tenant compte du fait que seulement 30 à 40 % des hospitalisations étaient directement dues à ce virus.