Moins du quart des Québécois ont reçu une dose de vaccin contre la COVID-19 au cours des cinq derniers mois. Redoutant une hausse de la propagation de la maladie avec l’arrivée de la rentrée scolaire, la Santé publique avance la campagne de vaccination pour toutes les personnes âgées de 18 ans et plus afin de leur permettre de mettre leur vaccination à jour.

Ce sont en effet seulement 23,5 % des Québécois qui ont reçu leur dernière dose au cours des cinq derniers mois, nouvel indicateur retenu par la Santé publique pour déterminer si la vaccination d’une personne est à jour. À la fin d’avril, les deux tiers (69 %) des Québécois avaient été récemment vaccinés, mais depuis, bien peu ont relevé leur manche pour une dose de rappel.

Par contre, on ne sait pas avec précision quelle part de la population a contracté la COVID-19 ces derniers mois et ainsi combien de personnes bénéficient d’une certaine immunité naturelle. L’accès aux tests PCR est en effet limité, et la majorité des gens ne rapportent pas le résultat de leurs tests rapides.

La semaine dernière par exemple, le ministère de la Santé a rapporté un peu moins de 7000 infections. L’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) évalue pourtant qu’au moins 140 000 personnes ont contracté la COVID au cours des sept derniers jours, soit 20 fois plus.

Pour l’heure, il semble que ce soit principalement chez les personnes âgées que la vaccination soit à jour. Près des trois quarts (72 %) des 70 ans et plus ont reçu au moins une dose au cours des cinq derniers mois. Chez les moins de 40 ans, ce taux tombe à moins de 1 sur 10.

« La campagne de vaccination évolue bien, et même très bien, mais il y a de l’espace pour les rendez-vous. On devance dès aujourd’hui la possibilité pour tous les 18 ans et plus de prendre rendez-vous », a expliqué le DLuc Boileau, directeur national de Santé publique, en conférence de presse, en précisant que les jeunes enfants pourront de leur côté profiter d’une dose de rappel « dès le milieu de la semaine prochaine ».

Selon lui, un vaccin bivalent, adapté aux différentes souches du variant Omicron, devrait être « disponible d’ici moins de deux semaines » au Québec.

Quand le nouveau vaccin va arriver, on va le changer pour le nouveau vaccin. Nous n’écoulerons pas les stocks qu’on a du vaccin actuel.

Le DLuc Boileau, directeur national de Santé publique

Pour l’instant, ce vaccin bivalent ne sera toutefois offert qu’aux personnes de 18 ans et plus. Les plus jeunes devront pour l’instant se contenter du vaccin actuel, a confirmé la Dre Caroline Quach, microbiologiste-infectiologue et présidente du Comité sur l’immunisation du Québec (CIQ).

La semaine dernière, la Santé publique fédérale avait dit « travailler le plus rapidement possible » afin d’approuver les nouveaux vaccins adaptés à Omicron des sociétés pharmaceutiques Moderna et Pfizer, jugeant qu’à la veille d’une potentielle huitième vague de COVID-19 à l’automne, obtenir une dose de rappel avec le vaccin actuel est une « priorité absolue ». Ottawa a déjà annoncé avoir sécurisé près de 12 millions de doses du nouveau vaccin bivalent pour une première livraison. Du nombre, 2,7 millions devraient revenir au Québec, en vertu du prorata de la population canadienne, a précisé mercredi le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS).

« Pas de catastrophe » à prévoir

Cette décision de devancer le début de la campagne de vaccination automnale survient alors que la Santé publique redoute une hausse des cas de COVID-19 avec la rentrée scolaire. « On l’a vu au cours des deux dernières années : la rentrée est une période charnière où la COVID-19 risque de montrer des signes d’augmentation, et qui pourraient possiblement arriver même plus vite que tard », a évoqué le DBoileau. « Le virus circule toujours. On a une courbe qui descend tranquillement, mais il est toujours là », a-t-il insisté.

Quant à elle, la Dre Marie-France Raynault, conseillère médicale stratégique senior au MSSS, s’attend aussi à « beaucoup d’infections », même si « beaucoup d’enfants ont fait la COVID-19 cet été ».

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

La Dre Marie-France Raynault, conseillère médicale stratégique senior au ministère de la Santé et des Services sociaux

Je n’attends pas de catastrophe. Je pense que nos enfants vont pouvoir continuer de bénéficier de la scolarité en présentiel.

La Dre Marie-France Raynault, conseillère médicale stratégique senior au ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS)

Les autorités ne jugent toujours pas « nécessaire » de réimposer le port du masque dans le réseau scolaire dans la foulée de la rentrée, jugeant notamment que cette mesure présente aussi « beaucoup d’inconvénients » pour le bien-être et l’apprentissage chez les plus jeunes. Québec encourage néanmoins les établissements à bien ventiler leurs classes et à être vigilants pour reconnaître des symptômes, afin de s’isoler en cas de contamination. « Ce sont des mesures suffisantes », estime le DBoileau.

« On ne s’attend pas à des infections sévères ou des complications. On va traiter ce virus-là comme un autre virus respiratoire », a aussi soulevé la Dre Quach, faisant valoir qu’aucune mesure restrictive n’est implantée pour les autres maladies respiratoires. « D’un point de vue développemental, l’enfant a besoin de voir l’autre, de comprendre ce qu’il lui dit aussi », a-t-elle également plaidé.

Si la rentrée devrait être un facteur aggravant de la huitième vague, la campagne électorale – qui sera déclenchée dimanche – ne devrait pas être « un facteur déterminant », selon le DBoileau. « Toutefois, les partis politiques dans la progression de leur campagne sont déjà avisés. Ils l’ont été à travers tous nos messages que le virus circule toujours, et qu’il faut prendre les mesures pour éviter de l’attraper et de le donner aux autres », a-t-il dit.

BREF ÉTAT DES LIEUX

Les 26 nouveaux décès rapportés mercredi portent la moyenne quotidienne calculée sur sept jours à 14. La tendance est en hausse de 9 % sur une semaine. Les 1986 personnes hospitalisées présentement (+ 27) représentent une tendance stable sur une semaine. Aux soins intensifs, les 41 patients représentent une baisse de 18 % sur une semaine. Le nombre de personnes hospitalisées devrait demeurer stable au cours des prochains jours, le nombre de sorties se rapprochant des admissions. Les 992 nouveaux cas rapportés mercredi portent la moyenne quotidienne à 887. La tendance est ainsi en baisse de 15 % sur une période d’une semaine.

Pierre-André Normandin, La Presse