Le pays s’est doté lundi d’une nouvelle arme pour combattre le virus. Santé Canada a approuvé le traitement Paxlovid de Pfizer, un médicament antiviral pouvant réduire jusqu’à 89 % les risques d’hospitalisation et de mort en raison de la COVID-19.

Jusqu’à présent, les médicaments contre la COVID-19 devaient être pris dans un hôpital ou un établissement de santé. Le Paxlovid est le premier traitement qui peut être pris chez soi.

« Une réduction du risque d’hospitalisation jusqu’à 89 %, c’est extrêmement significatif. C’est un outil très important », affirme d’emblée Nathalie Grandvaux, chercheuse au laboratoire de recherche sur la réponse de l’hôte aux infections virales du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM).

Le traitement est réservé aux adultes atteints d’une forme légère ou modérée de COVID-19 présentant un risque élevé d’évolution vers une maladie grave. Il doit être utilisé le plus tôt possible après le diagnostic de COVID-19 et dans les cinq jours suivant le début des symptômes, a indiqué lundi Santé Canada.

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Jean-Yves Duclos, ministre de la Santé

Il ne s’agit pas d’un substitut pour éviter la vaccination. « J’espère que tout le monde va comprendre que mieux vaut prévenir que guérir, a affirmé le ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos, en conférence de presse. Personne ne veut se retrouver avec un cas de COVID sévère, non seulement parce que ce n’est pas du tout agréable, mais parce que le Paxlovid ne garantit pas que la personne va être sauvée. »

Le Canada a reçu 30 400 boîtes de traitement Paxlovid jusqu’à maintenant, dont environ 6000 pour le Québec. « Ils sont livrés immédiatement aux provinces et aux territoires, donc ils seront disponibles pour un usage clinique très rapidement », a indiqué le ministre Duclos. Il s’attend à recevoir 120 000 traitements supplémentaires en février et en mars.

« Il s’agit d’une très bonne nouvelle, a réagi le ministre québécois de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, sur Twitter. On peut espérer que ce produit nous permette éventuellement de limiter nos hospitalisations dues à la COVID-19. » Il a ajouté attendre l’avis des experts de l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux à ce sujet.

Le chef conservateur Erin O’Toole a déploré le faible nombre de boîtes dont le Canada dispose présentement. « On a besoin d’en avoir plus pour les provinces, parce que c’est un outil important, particulièrement pour les plus vulnérables », a-t-il argué en conférence de presse.

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Le chef conservateur Erin O’Toole

Au début du mois de décembre, le gouvernement fédéral a conclu une entente avec la société pharmaceutique Pfizer afin de se procurer en tout 1 million de doses du traitement Paxlovid. Il a également l’option d’en acheter un demi-million de plus au besoin, a signalé la ministre des Services publics et de l’Approvisionnement, Filomena Tassi.

Forte efficacité

Ce médicament est composé de deux molécules. La première, le nirmatrelvir, bloque l’activité de la protéase, enzyme dont le coronavirus a besoin pour se répliquer. La deuxième, le ritonavir, permet de ralentir la dégradation du nirmatrelvir afin qu’il reste actif dans le corps plus longtemps. « La deuxième molécule agit comme un booster », illustre Mme Grandvaux.

L’administration du traitement développé par Pfizer consiste en une combinaison de deux pilules, prises deux fois par jour pendant cinq jours.

Dans les 28 jours suivant l’infection, seul 0,8 % des participants de l’étude ayant reçu le traitement ont été hospitalisés (3 patients sur 389), contre 7,0 % des patients ayant reçu le placebo (27 patients sur 385).

Aucun décès n’a été signalé chez les patients ayant reçu le traitement, contre 10 chez les patients dans le groupe placebo.

Effets secondaires

Les effets secondaires rapportés sont principalement de la diarrhée, des nausées et des vomissements, des douleurs abdominales, de l’irritation de la gorge ou de la toux, des maux de tête, des vertiges et des myalgies.

Le traitement peut entrer en interaction avec d’autres médicaments chez certains patients, ce qui peut diminuer l’efficacité du traitement ou causer des effets secondaires graves. Santé Canada conseille donc aux patients de parler des risques et des avantages du traitement avec leur médecin.

Son utilisation n’est pas recommandée chez les patients présentant une insuffisance rénale grave ou une insuffisance hépatique grave.

Distribution du traitement

Le Québec devrait recevoir entre 6000 et 7000 traitements par mois. Ces traitements devraient être partagés entre les établissements et les pharmacies communautaires, indique l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires (AQPP).

Pour obtenir un traitement, les patients devront avoir obtenu un résultat positif à la COVID-19, avec un test PCR ou un test rapide, et obtenir une ordonnance par un professionnel de la santé, a indiqué la Dre Theresa Tam, administratrice en chef de la santé publique du Canada, dans une séance d’information technique lundi.

« Il ne faut pas appeler les pharmacies pour en avoir, affirme Bertrand Bolduc, président de l’Ordre des pharmaciens du Québec. Ce n’est pas eux qui vont décider si vous pourrez obtenir le traitement. »

Il n’y en a pas beaucoup, alors ils seront donnés aux personnes sélectionnées par un médecin ou un pharmacien indépendant.

Bertrand Bolduc, président de l’Ordre des pharmaciens du Québec

L’AQPP estime que moins d’une centaine de pharmacies communautaires auront accès à ce médicament dans les prochains mois. La distribution du médicament vers ces pharmacies communautaires pourrait débuter dans la semaine du 31 janvier 2022, estime l’association.

Le coût n’est pas encore connu, mais en fonction des prix internationaux, le coût d’un traitement de cinq jours pourrait être aux alentours de 900 $.

Avec la collaboration de Mélanie Marquis, La Presse

Merck toujours en attente

Un deuxième médicament antiviral, celui de Merck, destiné aux adultes à haut risque, est toujours en attente d’approbation par Santé Canada. La société a déposé une demande en août pour le Molnupiravir. Selon des essais cliniques réalisés sur 1400 participants, le risque d’hospitalisation et de mort est diminué de 30 % au sein de la population fragile. Des effets secondaires suscitent toutefois des inquiétudes. Le médicament, qui doit être pris dans les cinq jours qui suivent l’apparition de symptômes, s’administre avec huit doses par jour pendant cinq jours. Il a déjà été autorisé aux États-Unis, au Royaume-Uni et au Danemark.

Alice Girard-Bossé, La Presse