(Rennes) Une infection par des champignons microscopiques peut aggraver la détresse respiratoire des patients atteints d’une forme sévère de la COVID-19, allant jusqu’à doubler leur taux de mortalité, selon une étude menée auprès de 576 patients en réanimation.  

Cette étude, baptisée MYCOVID et publiée dans la revue scientifique The Lancet Respiratory Medicine, a en outre mis en évidence un nombre élevé d’épisodes d’infections fongiques invasives prouvées ou probables (22,4 %), telles que l’aspergillose invasive.  

« L’aspergillose invasive, c’est une maladie qu’on connaît bien à l’hôpital chez les patients très immunodéprimés. Ces dernières années, on l’a vu apparaître chez les gens qui faisaient des grippes sévères avec syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) », a expliqué le professeur Jean-Pierre Gangneux, chef du laboratoire de parasitologie et mycologie du CHU de Rennes et coordinateur de l’étude.

Au début de l’épidémie de COVID-19, « quand on a vu les tableaux cliniques de la COVID-19, qui ressemblaient à des grippes sévères, on s’est dit qu’il fallait absolument qu’on mette en place une surveillance », a-t-il ajouté.

Démarrée en avril 2020, MYCOVID devait initialement suivre 250 patients depuis leur entrée jusqu’à leur sortie de réanimation. L’étude a finalement dépassé les 500 patients dans 18 centres hospitaliers à travers la France. « La plus grosse série mondiale » dans le domaine, selon le Dr Gangneux.

Pour les patients atteints d’une forme sévère de la COVID-19 et aussi infectés par une aspergillose invasive, l’étude montre un doublement de la mortalité (61,8 % contre 32,1 %). « Cette co-infection par un champignon est un évènement majeur qui vient aggraver la suite d’une infection COVID-19 grave », souligne le chercheur.

L’aspergillose pulmonaire invasive prouvée ou probable (14,9 %) et la candidémie (6,2 %) apparaissent comme les deux infections les plus fréquentes.

« L’aspergillus est omniprésent : on en respire trois ou quatre spores par mètre cube d’air. En situation normale, on les élimine », précise le chercheur.

Dans le contexte de patients COVID-19 atteints de détresse respiratoire aiguë, les chercheurs ont identifié trois facteurs de risques d’émergence de l’infection : l’âge (plus de 62 ans), deux médicaments anti-COVID-19 (la dexaméthasone associée à l’anti-IL6R) et la ventilation mécanique pendant plus de 15 jours.

« Il y a des facteurs aggravants liés au traitement » anti-COVID-19, a expliqué le chercheur. « Pour une grande majorité de gens, ce sont des traitements efficaces, qui permettent de traiter la maladie de fond. Mais ces traitements-là parfois favorisent l’émergence d’infections », a expliqué le Dr Gangneux.

D’autres études devront être menées afin de déterminer si un traitement antifongique précoce ou une prophylaxie sont nécessaires, selon les chercheurs.