L’inquiétant variant Omicron continue de se propager dans le monde, entraînant restrictions et fermetures de frontières. Tandis qu’un voyageur arrivé à Hong Kong en provenance du Canada a été déclaré positif à ce variant, certains experts en appellent à une couverture vaccinale plus équitable avec les pays moins nantis.

À Hong Kong, un voyageur venu d’Afrique du Sud a été déclaré positif au variant B.1.1.529, nommé Omicron, a rapporté l’agence Reuters vendredi. Un autre voyageur, arrivé, lui, du Canada, a aussi été déclaré positif alors qu’il était en quarantaine dans une chambre d’hôtel située en face de celle du voyageur sud-africain. L’utilisation par ce dernier d’un masque muni d’une valve qui ne filtrait pas l’air expiré pourrait avoir été à l’origine de la transmission du virus à l’occupant de la chambre d’en face, selon un porte-parole des autorités sanitaires hongkongaises.

« Affaires mondiales Canada assure un suivi suite aux reportages dans les médias [au sujet] d’un citoyen canadien en quarantaine à Hong Kong », a indiqué Christelle Chartrand, porte-parole d’Affaires mondiales Canada, dans un courriel envoyé à La Presse. « En raison des dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels, aucune autre information ne peut être divulguée », a-t-elle précisé.

Rappelons que l’apparition du variant Omicron, jugé « préoccupant » par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), lui a été rapportée le 24 novembre par l’Afrique du Sud. La première détection du variant dans ce pays remontait au 9 novembre. Elle coïncide avec une augmentation importante du nombre de nouveaux cas de COVID-19 en Afrique du Sud depuis deux semaines.

Ce variant présente « une multitude de modifications » génétiques, dit le virologue Benoit Barbeau, de l’Université du Québec à Montréal. « On pense qu’il y en a une cinquantaine, et 32 spécifiquement sur la protéine de spicule », précise-t-il. Ces variations pourraient le rendre plus transmissible, mais aussi plus résistant aux anticorps, explique le spécialiste.

Il a tous les indicateurs possibles pour risquer d’échapper à la réponse immunitaire chez les personnes vaccinées.

Benoit Barbeau, virologue

« ​​Omicron combine 32 mutations : c’est le double de ce qu’on a eu jusqu’à présent dans tous les autres variants », s’inquiète aussi Amir Khadir, microbiologiste et infectiologue à l’hôpital Pierre-Le Gardeur.

Transmission et restrictions

Après la Belgique, le Royaume-Uni, l’Allemagne, Israël, Hong Kong et l’Italie, la République tchèque a annoncé samedi un premier cas du variant Omicron chez une voyageuse de retour de la Namibie, selon l’Agence France-Presse.

Du côté des Pays-Bas, une soixantaine de passagers en provenance de Johannesburg et du Cap, en Afrique du Sud, étaient en quarantaine samedi. « Le variant Omicron a probablement été trouvé parmi les personnes testées », a indiqué l’Institut national de santé publique du pays. Les résultats définitifs devraient être connus ce dimanche.

Israël est devenu samedi le premier pays à annoncer la fermeture complète de ses frontières aux voyageurs étrangers pour une période de deux semaines, dans l’espoir de prévenir la propagation du nouveau variant, a rapporté l’agence Reuters. Les ressortissants israéliens devront aussi se mettre en quarantaine à leur retour au pays et le dépistage sera intensifié.

PHOTO RONEN ZVULUN, ARCHIVES REUTERS

Aéroport international Ben Gourion, en Israël

Depuis vendredi, le Canada a interdit l’entrée au pays des voyageurs en provenance d’Afrique australe. Les pays visés sont l’Afrique du Sud, le Mozambique, le Botswana, le Zimbabwe, le Lesotho, l’Eswatini (Swaziland) et la Namibie.

Un grand nombre de pays, dont les États-Unis et le Royaume-Uni, ont aussi annoncé des restrictions à leurs frontières pour les voyageurs en provenance de certains pays d’Afrique, ainsi qu’un durcissement des règles de quarantaine et de dépistage.

L’Afrique du Sud « punie »

L’Afrique du Sud est « punie » pour avoir détecté le variant Omicron, s’est insurgé samedi le gouvernement de Pretoria, selon l’Agence France-Presse. Le pays a dénoncé un phénomène de « panique » et des mesures « draconiennes » injustifiées. En réponse, les États-Unis ont félicité l’Afrique du Sud pour sa « transparence » avec le reste du monde dès la découverte du variant Omicron.

L’industrie touristique, vitale en Afrique du Sud, est largement affectée par les restrictions de voyage. « Ç’a été un gros coup pour nous, déplore Craig Spencer, fondateur et directeur de l’organisme antibraconnage Transfrontier Africa. On a eu une équipe médiatique qui s’est esquivée à la dernière minute et DER Touristik, une grosse agence de voyages, qui a annulé. D’autres aussi », a-t-il expliqué à La Presse.

PHOTO PHILL MAGAKOE, AGENCE FRANCE-PRESSE

Des voyageurs font la queue à un comptoir d’enregistrement à l’aéroport international OR Tambo de Johannesburg.

L’aéroport de Johannesburg, en Afrique du Sud, a été pris d’assaut vendredi et samedi par des voyageurs souhaitant attraper un vol de retour.

Une couverture vaccinale inéquitable

Le variant Omicron a émergé dans un quartier densément peuplé où la couverture vaccinale était plus faible que dans le reste de l’Afrique du Sud, explique Amir Khadir. « Les endroits les moins vaccinés sont des incubateurs [pour les variants] », rappelle le microbiologiste.

L’Afrique est le continent le moins vacciné. Les taux de vaccination dans les pays visés par l’interdiction d’entrée du Canada sont très faibles : 24,4 % en Afrique du Sud, 11,4 % au Mozambique, 20,4 % au Botswana, 19 % au Zimbabwe, 26,9 % au Lesotho, 11,8 % en Namibie.

Ce qu’on vit, c’est une illustration, s’il en fallait encore une, que si on ne règle pas l’épidémie partout, on ne la règle nulle part.

Amir Khadir, microbiologiste

Selon lui, les brevets accordés aux sociétés pharmaceutiques qui ont mis au point les vaccins devraient être retirés afin d’assurer une couverture vaccinale planétaire. « Ces brevets ont été financés par le domaine public à l’échelle internationale. Il n’y a aucune raison que le domaine pharmaceutique accapare ces brevets. L’état d’urgence ne s’applique-t-il pas aux profits des compagnies ? »

Le virologue Benoit Barbeau insiste aussi sur l’importance de la vaccination partout dans le monde. « On parle d’une troisième dose pour tous au Canada, mais on devrait plutôt s’assurer qu’ailleurs, les gens soient bien vaccinés », estime le professeur.

Près de 54 % de la population mondiale a reçu au moins une dose de vaccin contre la COVID-19, mais seulement 5,6 % dans les pays à faible revenu, selon le site Our World in Data.

Le président des États-Unis, Joe Biden, a fait écho samedi aux appels réitérés de l’OMS à aider les pays pauvres à vacciner leur population pour éviter l’émergence de nouveaux variants.

Depuis la fin de 2019, la COVID-19 a fait au moins 5,18 millions de morts dans le monde, selon un décompte de l’Agence France-Presse.